les fils effilochés de l’amitié (2013)

Une traduction de « Frayed threads of friendship »

Traduit principalement par DC et AD  

Introduction française

 A l’origine, le texte qui suit fut publié en anglais fin décembre 2012. Il était inclus dans un document beaucoup plus long : « Cop-out – the significance of Aufhebengate » (« Cop-out – l’importance de l’Aufhebengate »). « Cop-out » est, en anglais, un jeu de mots ; c’est une manœuvre évasive, et un cop est un flic. Ce texte constitue une réponse à la polémique qui éclata en octobre 2011 quand des amis en Grèce (du groupe TPTG), et moi-même, nous avons rendu public le fait que John Drury, membre du groupe ultra-gauche Aufheben, publiant le magazine du même nom, avait donné des cours à des officiers de police concernant le contrôle des foules. Aufheben est bien connu, en particulier en Grande-Bretagne, pour avoir publié des articles intéressants dans une perspective marxienne. Drury avait aussi co-écrit plusieurs articles pour donner des conseils à la police sur la façon de diviser de telles foules en « manifestants pacifiques » et « fauteurs de troubles » afin de mieux les pacifier tous. Depuis longtemps, il faisait partie d’une équipe étudiant la « psychologie des foules ».

En réponse à la prise de position de mes amis grecs, et à la mienne, pas mal de personnes dans le milieu libertaire et ultra-gauche au Royaume-Uni, et dans le monde anglophone (en particulier sur le site Libcom.org sur lequel j’avais créé un blog entre fin septembre 2010 et début octobre 2011), se contorsionnèrent pour trouver des « arguments » afin de défendre Drury, et la manière même dont Aufheben justifiait son activité. Nombre d’entre eux le firent parce qu’il était leur ami. Mais il ne faut cependant pas s’en tenir à cette explication-là. Il est essentiel, dès que l’on aborde les rapports dialectiques complexes qui existent entre les choix subjectifs et les conditions données, de comprendre les contradictions que recèlent les relations amicales, comme d’ailleurs les autres composantes de nos vies. L’histoire n’est pas simplement une force extérieure au sein de laquelle nous devons intervenir. L’amitié, le domaine de la vie le plus dominé par les choix individuels, est aussi affectée par l’histoire, par les flux et reflux de la lutte des classes.

Ce qui suit est une généralisation théorique concernant certaines de ces contradictions, ayant aussi impliqué des amis proches. Il n’est cependant pas nécessaire de connaître les détails de cette polémique particulière pour comprendre ce texte et en tirer des enseignements.

Les fils effilochés de l’amitié

« L’opposition est la véritable amitié. »

William Blake

1

De la même façon que nous ne pouvons pas comprendre le monde si nous n’essayons pas de le changer, nous ne pouvons pas comprendre nos amitiés tant que nous n’essayons pas de les transformer. Clarté bien ordonnée commence par soi-même.

2

A bien des égards, les rapports de domination propres à cette société se reproduisent aussi à cause de nos acceptations qui, à des degrés divers, forment un réseau complexe, par rapport à ce que l’on appelle l’amitié. Cette société se maintient en effet autant par les formes de répression qui existent au sein des formes traditionnelles de l’amitié que par l’identification à telle ou telle politique ou à la nation, en particulier parce que l’amitié fonctionne à un niveau beaucoup plus personnel, moins objectivement défini, que les nationalismes ou les organisations politiques traditionnelles qui se substituent à une communauté authentique. De même, une opposition à ce monde ne peut se développer sans que l’amitié devienne inséparable de la solidarité. Il est nécessaire de combiner l’opposition à la   politique hierarchique et l’affection. Solidarité bien ordonnée commence par soi-même.

Cette séparation se présente sous deux facettes. Il est clair, par exemple, que pour de nombreuses organisations anarchistes ou ultra-gauches la vie quotidienne est réduite à être ce à quoi on revient après que la réunion soit terminée. De telles organisations tendent inévitablement à réduire les gens aux fonctions qu’elles leur attribuent, à n’être que des membres de l’organisation, et ceux-ci acceptent volontiers ce rôle. Dans une large mesure, la séparation entre la fin et les moyens, et les relations faites de rivalités et d’intrigues sont tolérées spontanément avec des haussements d’épaule signifiant : « Comment peux-t-on faire autrement ? » Au lendemain de la chute du mur de Berlin, un ultra-gauche berlinois, après avoir demandé si nous étions là pour papoter en prenant un verre ou pour parler politique, admettait, deux pintes plus tard, qu’il avait le sentiment que, parfois, faire de la politique consistait à agir à l’image des businessmans. Mais après plus de vingt ans de contre-révolution, la séparation dominante entre l’intellect et les émotions, l’analyse et la critique par rapport aux pôles positif et négatif des sentiments (l’amour, l’amitié, le respect et l’affection ; la haine, la colère, le mépris et le dégoût) ne sont même plus considérées comme problématiques et comme un enjeu de lutte pour la majorité des membres de l’ultra-gauche.

Note de bas de page : En rapport avec cela, on peut aussi citer la remarque suivante écrite par  l’une des personnes avec qui j’ai parfois des échanges par lettre « Il y a quelque chose dans le jargon des membres du groupe Solfed [une organisation anarcho-syndicaliste britannique] qui m’exaspère. Leur discours manque complètement d’épaisseur, est dépourvu d’émotion, pue l’universitaire faisant des efforts pour parler comme un simple prolo. Tels les fils d’une toile d’araignée poussiéreuse, leurs pensées se sont transformées en formules abstraites, très ennuyeuses, insipides et bureaucratiques, et vraiment décalées par rapport au monde des gens “en chair et en os”. Comme, par exemple, le débat sur le fait d’être un groupe politique ou plutôt un groupe économique et politique, et ainsi de suite. Je me rappelle avoir lu, il y a quelque temps, des textes écrits par des membres de la FAI et, quelle que soit la critique que l’on en fasse maintenant, ce qui fait que ces textes me restent en mémoire, c’est qu’ils communiquent une passion et un désespoir à un degré que l’on ne retrouve jamais vraiment dans ce qui provient des révolutionnaires d’aujourd’hui. On ressent, de façon frappante, qu’ils s’exprimaient du fond du cœur. On ne retrouve pas cela chez Solfed ou chez la plupart des groupes communiste ultra-gauches comme Aufheben, même pour leurs articles qui sont très bons par ailleurs. Je ne suis pas certain de ce que cela signifie, à part peut-être que l’attachement à la lutte de classe est, pour trop de personnes, essentiellement intellectuel. Cela explique qu’ils soient très peu à l’aisepour communiquer ce qu’ils ressentent aussi bien que ce qu’ils pensent. »

L’amitié sur le mode traditionnel constitue l’autre facette de cette séparation. Elle repose sur l’idéologie selon laquelle « l’amitié passe avant la politique ». Tant qu’il s’agit de refuser la mentalité racketteuse régnant dans les rapports entre bandes politiques rivales, cela apparaît comme une avancée. Les relations d’amitié traditionnelles sont généralement moins prétentieuses que les relations politiques. Elles impliquent un minimum de générosité, de soutien mutuel dans l’adversité et le désir d’apprécier mutuellement la compagnie de l’autre autant que possible. Mais le manque de critique par rapport à quoi que ce soit qui serait extérieur à ce qui est immédiat et, souvent, l’attitude sentimentale qui se base sur ce que l’on avait de commun dans le passé – mais de moins en moins dans le présent – constituent des limites. Qui plus est, cette « amitié » est autant sujette à la mentalité de bande que l’est la politique. Il s’agit souvent de prendre position pour un réseau d’amitiés contre un autre, avec l’habitude d’esquiver tout questionnement concernant des contradictions significatives qui se manifestent chez des amis. Y compris quand cela implique d’éviter d’agir de façon solidaire avec ceux qui s’opposent à des formes concrètes de complicité avec le pouvoir (comme on l’a observé, par exemple, dans l’affaire Drury-Aufheben mentionnée plus haut).

En réalité, ces deux facettes se combinent souvent de diverses façons, mais afin de dégager différents éléments propres à ces « types » d’amitiés, il a été nécessaire de les examiner de façon distincte.

3

Au cours de soulèvements, les individus s’aventurent hors des limites de leurs « milieu », rompent avec certaines personnes avec lesquelles ils entretenaient auparavant des relations, rencontrent des individus ou des groupes issus de milieux différents. S’ouvre alors un nouveau monde de relations plus fluides qu’à l’accoutumée. Ensuite, après le reflux ou la répression du soulèvement, les vieilles relations, des couples aux organisations politiques, peuvent sembler insupportables et artificielles. Les séparations et les étroitesses qui leur sont propres apparaissent visiblement comme factices. Alors, certains individus tentent de dépasser les limites de telles relations par la critique ou les formes d’expérimentation envisageables. D’autres tombent dans la déprime, et/ou l’ennui et/ou dans une quête étroitement  hédoniste de plaisirs faciles, en réaction au sentiment de défaite ou de trahison, qui suit l’expérience trop fugace de l’air frais de la liberté. À laquelle succède le retour à la grisaille des vieilles habitudes et d’une vie n’allant nulle part.

4

« … Tout le bon temps que j’ai perdu à prendre du bon temps. », « The Animals »,http://www.youtube.com/watch?v=U9G9eog5lPA.

Le besoin de prendre du bon temps dans les limites considérées comme acceptables par les formes d’hédonisme résigné dépend des conditions historiques, autant que quoi que ce soit d’autre. Comme l’écrivait récemment un ami aux Etats-Unis : «  A Oakland, la situation semble plutôt dure ces derniers temps  ; j’ai rencontré quelques-uns de mes amis, qui sont immergés un peu trop à mon goût dans le monde des drogues et de la fête, d’une façon qui faisait peine à voir. Tout se casse un peu la gueule et il semblerait que maintenant qu’il n’y a plus autant de conflits dans la rue, les gens cherchent ailleurs d’autres sources d’excitations… » Les luttes qui ne se renouvellent pas  tendent à générer cette sorte de recherche désespéré de plaisir, pour laquelle, de toute façon, celui-ci ne sera jamais suffisant.

Dans la scène d’ouverture du vieux film de 1960 « Saturday night and sunday morning » (« Samedi soir et dimanche matin »), le personnage principal, joué par Albert Finney, déclare, alors quele travail finit le vendredi soir et que son week-end commence : « Je voudrais bien voir quelqu’un qui m’écraserait, tiens ! Ça serait quelque chose ! Ce que je recherche, c’est prendre du bon temps, tout le reste est de la propagande. » De nos jours, les gens sont écrasés bien plus que dans les années 1960 et l’une des raisons pour laquelle ils évitent de discuter des questions sociales importantes, en particulier celles qui les concernent le plus directement, c’est qu’ils veulent juste se détendre après le stress dû au travail et aux autres souffrances qui nous sont imposées. Ce n’est pas seulement la propagande qu’ils rejettent, mais aussi la critique, considérée comme quelque chose de froid, empêchant de s’amuser. Mais les idées critiques que l’on a développées à travers les épreuves et les erreurs, à travers les luttes et les réflexions sur celles-ci, impliquent entre autres choses, pour pouvoir se développer, de se confronter aux manipulations de la propagande (ouvertement capitaliste ou soi-disant anti-capitaliste), mais aussi aux formes significatives de complicité avec cette société. Dans le même temps, le rejet de la propagande (que ce soit sous la forme des dogmes dominants de l’économie marchande ou des idéologies « contestataires » qui proposent de la réformer, ou de médisances) reconnaît que le refus de la critique n’est pas la meilleure manière de rejeter toutes les manipulations. Ce même rejet implique que ces « bons moments » conventionnels risquent de devenir pires, d’autant plus reprimés qu’ils ne résultent pas de luttes  d’autant qu’ils ne s’y opposent pas  Tout le monde veut mener une vie facile, mais y accéder n’est pas du tout si facile. Alors les « bons moments » imposent des tentatives de plus en plus désespérées d’immersion dans l’immédiat sans recul ou distance critique, immédiat fait de drogues de boisson, de culture (populaire ou plus sophistiquée) et autres religions de plus en plus dévastatrices. Même si le désir de vivre, qui s’affirme avec notre activité critique pratique, est une source de joie, souvent drôle, absorbante, pleine de sens et exaltante, il est aussi nécessaire de se lancer dans des luttes qui ne sont pas directement liées au plaisir immédiat que trop de gens recherchent en vue de consommer du palisir par des marchandises . De nos jours, quiconque, ou presque, qui discute des contradictions importantes est considéré comme un rabat-joie et sans doute comme quelqu’un qui se prend trop au sérieux. Ce n’est pas que les gens soient nécessairement hostiles aux bonnes discussions contradictoires, mais ils souhaitent que celles-ci restent à un niveau qui exclut leurs propres contradictions et, surtout, qu’elles n’entraînent aucune action pratique de leur part. Quelqu’un qui discute de choses qui impliquepersonnellement et émotionnellementles participants de la discussion et les confronte à leurs contradictions, ou qui soulève des enjeux impliquant la nécessité d’agir, est considéré comme un emmerdeur et n’est plus invité au prochain dîner.

5

« Eprouver des sentiments d’affection à légard d’autres personnes n’est pas contradictoire en soi au maintien du point de vue individuel – la véritable affection ne peut même exister que là ou il y a affirmation individuelle – mais  seulement quand ils servent de justification pour une personne à l’abandon de son point de vue. Les rapports affectifs sont ces rapports justifiés par “l’affection”, qui ne  se maintiennent que sur la base d’une refoulement.

La pseudo-affection, qui sert de justification à la trahison de soi-même, doit être elle-même  justifiée – pour donner une apparence de cohérence à cette trahison même – par les qualités objectives, réelles ou imaginaires, rencontrées chez les gens auxquels est portée. Mais ce faisant, l’individu affectif révèle qu’il aspire à être ainsi aimé, pour ses  qualités “objectives”, intrinsèques, alors même qu’il ne sait pas les mettre en oeuvre pour lui-même – donc, elles n’existent plus – pas plus qu’il ne saurait connaître par la pratique les qualités de ses amis. Ayant renoncé à son point de vue, à la critique, il demande la reciproque,  qu’on le laisse en paix, qu’on l’accepte tel qu’il est. C’est en fait   la  vieille conception mystico-bourgeoise de la “richesse intérieure de l’être humain  toujours à découvrir” ,  qui voudrait que l’on soit autre chose que ce qu’on fait qu’on retrouve ici »

Nadine Bloch, « Compte-rendu », 1976.

6

Depuis la fin des années 1970, les prolétaires, en nombre croissant, ne jouent heureusement plus des rôles faits de rigidité, d’arrogance ou de discours verbeux. Malheureusement, ils ne s’opposent pas non plus à cette société ou aux pouvoirs qui peuvent surgir, en particulier quand les comportements idéologiques favorables à l’Etat ou au marché s’expriment chez leurs amis. Nous assistons ici au développement d’une sorte de posture « anti-rôle » chez des individus qui, tout en adoptant souvent quelque phraséologie « anti-capitaliste », ne disent ou ne font rien qui puisse bouleverser l’équilibre de leurs relations conservatrices. L’humilité a remplacé l’arrogance. Mais alors que la vaine prétention des individus arrogants provient de leur illusion de jouer des rôles importants malgré la faiblesse de l’efficacité de leur idées sur la société ainsi que de leur manque d’empathie, ceux qui sont excessivement humbles considèrent leur point de vue comme tellement insignifiant qu’ils ont décidé que l’exprimer  être renforcer par des actes à ceux d’autrui revient à faire preuve de sérieux excessif et à  être trop prétentieux.

Dans un monde insensé, lutter pour une société passionnante et rationnelle est considéré comme le fruit de conceptions irréalistes et fantaisistes, en matière de priorités et de résolution excessive. Alors que la gueule de bois toujours persistante du post-modernisme essaie toujours de valoriser l’actuelle absence de sens comme réaliste car non idéologique, une telle résignation devient de plus en plus visiblement complice des horreurs d’une société de classes s’enfonçant dans la crise. Cependant, malgré l’évidence, le sentiment que rien ne peut être fait devient une excuse pour ne même pas faire le premier pas. Après tout, l’avancée « minable » le serait trop, et ne mériterait pas l’effort nécessaire. Cette critique des limites évidentes des « premiers pas » n’a pas pour objectif ici de s’approcher d’une pratique qui serait plus efficace. C’est une façon de s’excuser de ne rien faire du tout : le négatif coagulant ainsi en négativisme. Les démoralisés doivent toujours rabaisseret ricaner, de façon sarcastiqueà leur niveau de démoralisation ceux qui essaient de faire quelque chose car ils ne peuvent supporter ce qui leur rappelle leur propre inertie. Ils ont besoin de prétendre que chacun fait de même. Ici, l’humilité et l’arrogance se combinent pour donner des démonstrations agressives d’impuissance. Les « humbles » demandent de façon arrogante que nous soyons aussi inconséquents qu’ils le sont. Et c’est vous qui êtes accusé d’arrogance pour changer, ne serait-ce que de façon minime, une situation qu’ils ont mis tant d’entêtement à ne pas modifier. « Echouer à se changer soi-même et à changer la société est bredouillée à travers l’expression publique d’une conscience impuissance. Cela est acclamé partout comme une marque de sophistication… Au-delà des absurdités esthétisées le choix est simple : soit on se soumet à son destin, soit on s’attaque aux bases objectives de sa propre participation à ce qui fait de nous d’éternels perdants ».« Two local chapters in the spectacle of decomposition ». Chris Shutes.,http://libcom.org/library/two-local-chapters-spectacle-decomposition-chris-shutes

7

Plus de vingt ans de sévère contre-révolution ont usé et effiloché les fils fragiles de l’amitié, et, de façon inséparable, la fragile identité personnelle, de telle façon que de plus en plus les gens se rattachent à n’importe quelle « communauté » juste pour sentir qu’ils existent.

Au Royaume-Uni, cette subjectivité réprimée s’est encore exacerbée énormément depuis le début des années 1990, et on peut dire que, depuis la dernière grande crise de la société de classes (les émeutes liées à la Poll Tax), de telles crises ont pris un aspect de plus en plus marginal jusqu’à l’attaque de Millibank en octobre 2010. Cet affaiblissement profond de la capacité des individus à contester cette société du fait de la contre-révolution a affecté tout le monde, les « révolutionnaires » comme les autres, évidemment. Une sorte de relativisme indifférent règne, un éclectisme pour lequel toutes les perspectives incompatibles sont réduites à une équivalence post-moderniste. Quand quelqu’un considère quelque chose comme vital, on l’accuse de monter sur les grands chevaux du moralisme et de chercher à compenser quelques frustrations.

Certaines zones géographiques où l’isolement est particulièrement aigu, en particulier celles où les communautés de lutte sont peu nombreuses, contribuent au développement de l’idée selon laquelle « n’importe quelle amitié vaut mieux que de prendre des risques calculés avec l’amitié ». Alors que se vanter de ses conquêtes sexuelles est considéré comme quelque peu minable, triste et archaïque, ce n’est pas le cas lorsqu’il s’agit des amis. D’où toutes ces pages Facebook comprenant de grosses listes d’amis, histoire d’essayer de faire impression en voulant montrer à quel point on est apprécié (souvent, particulièrement avec les ados, cela inclut des personnes vues une seule fois, ivres au cours d’une fête). Pour cacher notre isolement, nous devrions afficher ostensiblement ces nombreux amis. Non seulement la quantité prédomine sur la qualité, mais aussi le spectacle de l’amitié cache sa superficialité. On cherche à éviter soigneusement de dépasser les limites pour ne pas que soient testées ces relations superficielles.

Au Royaume-Uni, je connais des gens qui ont une attitude amicale envers l’un des anciens membres de Class War (Guerre de classe, le plus connu des groupes anarchistes anglais des années 1980/1990) qui défend publiquement sur Internet des positions complètement nationalistes relatives au contrôle de l’immigration parce que c’est, selon lui, ce que voudrait la classe ouvrière (à notre époque, diverses solutions nationalistes pseudo anti-capitalistes peuvent conduire à certaines formes de fascisme). Il est toléré parce que ce serait « un type sympa », justification qui ignore complètement la politique odieuse qu’il défend (déjà il y a plus d’un siècle, l’immigration irlandaise au Royaume-Uni était combattue de façon raciste parce qu’elle abaissait les salaires des ouvriers anglais : Keir Hardie [le premier leader du parti travailliste], notamment, était l’un des partisans les plus connus de cette perspective nationaliste).

Mais cela n’est pas du tout confiné au Royaume-Uni. Un exemple absurde de ce genre de cas poussé à l’extrême est l’histoire dont j’ai entendue récemment parler à propos d’anarchistes australiens. Lorsqu’ils ont découvert que l’un d’entre eux était un flic infiltré, ils ont réagi en disant : « Ok, mais c’est un type sympa. » Sans se poser plus de questions sur la façon d’être sympa du type en question, ni sur ce qu’être sympa peut vouloir dire pour avoir vraiment un sens. Porter des jugements à partir de considérations très superficielles sur la personnalité et l’image de quelqu’un – ces critères à partir desquels de plus en plus de prolétaires sont désormais acceptés ou rejetés pour bon nombre de postes de travail – est de plus en plus appliqué aux relations personnelles. Mais la superficialité de tels critères est rarement remise en cause. Car s’ils étaient critiqués de façon conséquente et de manière à subvertir l’odieux monde dans lequel nous vivons, nous trouverions derrière beaucoup de belles façades des attitudes très déplaisantes, profondément complices des méfaits du capital (et pas seulement chez des flics infiltrés). De tels jugements superficiels montrent à quel point la classe ouvrière a été énormément affaiblie.

Ignorer (dans un sens pratique) le comportement malsain de quelqu’un parce qu’il est « sympa » est souvent le reflet du désir d’être accepté ou apprécié pour sa propre personnalité résignée aussi longtemps qu’on la maquille avec des sourires. Dans un monde fondamentalement schizoïde, cette tolérance et ce désir d’être toléré pour sa propre résignation sont achetés au prix d’une trahison de soi fondamentale. Les gens ont développé un tel manque de confiance névrotique, pour ce qui est de s’affirmer et de risquer de choquer les autres, qu’ils rappellent presque ces ados des vingt dernières années dont chaque phrase, même la plus convenue, sonne comme une question de peur qu’elle paraisse trop affirmative. Le désir de popularité ainsi que le besoin être apprécié à tout prix expriment la peur profondément enracinée de reconnaître l’existence des séparations et encore plus celle de tenter de les surmonter. Dans un monde d’étrangers, ceux qui essaient de faire tomber les masques socialement acceptables sont considérés comme des êtres étranges. Au Royaume-Uni encore plus qu’ailleurs… Alors que la vie des individus devient de plus en plus précaire, leur propre perception de leur identité devient elle aussi de plus en plus précaire. Eviter de se confronter aux fondements matériels de cette fragilité implique aussi d’éviter d’essayer de subvertir les frustrations en matière d’amitié, et d’éviter toute activité qui pourrait dépasser de telles frustrations. Il résulte de cette fragilité intensifiée que, chaque fois qu’une contradictions significative apparaît dans telle ou telle relation amicale, au lieu de prendre le risque de demander à l’ami d’arrêter de faire ce qui vous dérange sérieusement de façon régulière, ou de proposer un projet qui pourrait amener à se confronter à cette contradiction, un compromis évitant toute rupture avec le passé est passé et la tension qui en résulte est réprimée. Et le même problème se repose régulièrement. Ou alors une rupture a lieu sans explication, afin d’éviter les conséquences sociales qui pourrait en résulter pour le réseau d’amis. Ces cercles vicieux doivent être brisés (et certains cercles d’amis peuvent être très vicieux).

Les contradictions propres aux relations d’amitié traditionnelles se sont accumulées au cours des vingt dernières années de contre-révolution. Elles tourmentent, tels des rêves déconcertants, l’esprit et le corps des relations vivantes. Au cours de la période antérieure, celle du sommeil agité dans lequel les prolétaires s’étaient installés, l’attitude sentimentale envers des amitiés basées sur le passé et l’habitude, même celles nées au sein des luttes, s’est réduite, pour beaucoup, au minimum : la réciprocité dans le donner et le recevoir sans plus d’exigences que cela, si ce n’est la vague adhésion au verbiage contestataire. Mais à l’époque actuelle où, clairement, un futur brutal nous attend, les traditions du « plutôt n’importe quelle amitié qu’aucune » sont des freins à la nécessité de développer une opposition au train fou de l’économie. Il faut exiger plus que ce minimum pour qu’amitié veuille dire aussi solidarité, et chercher à clarifier ce qu’une telle solidarité signifie concrètement.

Dans cette retraite qui n’a rien d’expérimental, beaucoup d’individus ont choisi de jouer le rôle de spectateurs de l’opposition, aussi complaisant que toutes les autres prétendues communautés. Les mœurs de la « bonne société », basée sur le fait de ne pas dire ce que l’on pense, ont tellement envahi la vie quotidienne que même ceux qui prétendent s’y opposer évitent soigneusement tout embarras qui pourrait résulté d’une critique conséquente, et plus encore d’une critique qui aurait des conséquences pratiques. En fait, ceux qui, apparemment, s’opposent à cette société sont souvent plus atteints par l’autosatisfaction que génèrent constamment ces « mœurs » que ceux qui n’ont pas déployé l’écran de fumée de la « critique ». Leur identité, en tant que rebelles, leur laisse à penser que, en affichant simplement cette identité, ils font réellement quelque chose pour ne pas être complices de cette société. Qu’en professant ou en consommant un ensemble de croyances et de routines ils peuvent correspondent confortablement à leur étiquette « rebelle » marxiste, communiste, anarchiste, quoiquecesoitiste. Il y en a certains qui sont, c’est clair, intellectuellement (mais pas pratiquement) compétents : ils apportent des éclairages nouveaux sur les aspects les plus objectifs des nouvelles formes d’aliénation. Mais ils n’innovent que sur le plan théorique, un peu comme l’école de Francfort en son temps, même s’ils le font avec plus de conscience de classe prolétarienne. Ils ont oublié les moments aujourd’hui révolus, quand ils exprimaient directement leur authentique mécontentement, prenaient des décisions qui bouleversaient un peu leur équilibre et celui des relations sociales dominantes, faisaient preuve d’esprit d’initiative, poussés par leur juste colère, utilisaient leur compréhension du monde en se préoccupant des conséquences pratiques, et demandaient le soutien et l’encouragement de leurs amis. Aujourd’hui, les liens entre les individus participant à telle ou telle communauté d’« intellectuels » peuvent être aussi ténus que ceux qui existent dans des communautés basées sur des loisirs ou des goûts communs. Mais ces relations sont encore plus contradictoires puisque cette communauté prétend se confronter aux misères de la société. La contre-révolution s’est aussi manifestée par le retour répressif vers les formes traditionnelles, convenues, consensuelles et superficielles, de l’amitié. Et quand il y a des loyautés conflictuelles, ceux qui sont au milieu du chemin évitent généralement l’inconfort qui consiste à prendre parti, ou alors leur prise de position consiste à mettre soigneusement en avant leur différences avec les deux côtés, de peur de conséquences qu’ils craignent de ne pas pouvoir contrôler. C’est-à-dire qu’ils restent, à toutes fins utiles, passifs et silencieux, ayant seulement l’intention et l’ambition de rester assis entre deux chaises, demeurant amis avec tout le monde et rejetant toute tentative de les persuader de prendre quelque position conséquente, mais « compromettante ». L’amitié résultant de prises de position personnelle et permettant de rejoindre ceux qui en font autant a été oubliée. A l’époque actuelle, vu l’importance des enjeux, c’est cela, cette solidarité élémentaire, qui doit devenir la norme pour que les luttes contre les terreurs à venir puissent avoir quelques chances de succès.

8

C’est dans cette atmosphère consistant à suivre le mouvement de la contestation, largement acceptée, que rendre public notre dégoût pour Aufheben et ses défenseurs devait rencontrer de telles obstructions et résistances, y compris chez certains qui partageaient aussi ce dégoût. Pourtant, il était essentiel de prendre position publiquement pour quiconque se préoccupait sérieusement de ne pas permettre que se reproduise ce genre de récupération. Et pour que les individus dans les manifestations puissent prendre des décisions en connaissance de cause sur le fait d’accepter ou non à leur côté ce spécialiste en psychologie des foules. Mais cela perturbait la mentalité généralement partagée : « Ne regardons pas notre propre indifférence et couardise, continuons notre routine politique comme si de rien n’était ». Et au Royaume-Uni cette « communauté » routinière souhaite juste continuer sa routine des rassemblements politiques, se ranger aux côtés de telle organisation ou clique contre telle autre, ou contre tel ou tel individu. Rien de plus que les commérages politiques sectaires ou la critique psychologisante, souvent privés et sans conséquences. Les participant à ce spectacle sont liés entre eux, ne serait-ce que par un réseau commun d’amitiés. Donc, le fait de dévoiler publiquement de telles contradictions doit être combattu, par le mensonge mais aussi avec des considérations humanistes hypocrites. Pour ces gens, les milliers de personnes directement affectées par les applications des recherches de l’équipe de psychologue des foules et les tactiques de « diviser pour mieux régner » qui en découlent ne sont que des individus abstraits, seuls comptent pour eux les personnes (par exemple John Drury) qu’ils connaissent personnellement.

9

Dans les années 1970, au sein de certaines sections de ce qui était à l’époque une sorte de milieu révolutionnaire, quand quelqu’un entrait en conflit avec des amis, cela devenait aussi quelque chose qui importait pour les autres personnes qui les connaissaient (en fait dans une certaine mesure, c’est toujours le cas pour certaines personnes, mais pas tellement au Royaume-Uni). La curiosité portée aux problèmes concrets immédiats constituait en partie la base à partir de laquelle développer des formes de curiosité sociales plus générales. De nos jours, ce qui domine, c’est plutôt l’attitude suivante : « Mes conflits sont les miens, les tiens les tiens, que chacun s’occupe de ce qui le regarde. » Ceci dit, bien qu’il ne s’agisse pas de suggérer que les personnes devraient nécessairement prendre parti (elles peuvent au lieu de partager l’une des deux positions, en prendre une troisième, en créer d’autres), il semble que les discussions contradictoires concernant des enjeux significatifs soient des indicateurs de contradictions plus larges. C’est battre en retraite vers l’abstraction, vers l’individualisme et vers une conception idéologique séparée de l’autonomie que ce qui est en fait social soit devenu séparé, « individuel » dans un sens privé.

10

Alors que le capitalisme moderne fabrique en masse le besoin d’illusions consolantes, et par-dessus tout celui de communautés illusoires, ceux qui s’identifient à l’opposition au capitalisme et essaient d’y contribuer se reconnaissent avec raison dans d’authentiques communautés de lutte, avec toutes leurs contradictions. Cependant, la destruction des éléments de la vie qui existent en marge de l’économie, qui s’en libèrent en partie et qui lui résistent, a fait que de plus en en plus d’individus brisés s’identifient avec une bande, un milieu, une clique, une organisation politique ou une commune, pour avoir quelque illusion sécurisante de communauté, protection souvent imaginaire, parfois authentique, contre les vents froids du capital. Beaucoup de ceux qui espèrent contribuer à la guerre de classes, plutôt que d’organiser des activités spécifiques à titre de participation directe à l’histoire, s’identifient avec telle scène ou organisation spécifique, médiation à travers laquelle ils entrent en relation avec la communauté de luttes globale. La famille traditionnelle est ainsi remplacée par une sorte de famille alternative. Mais comme dans la famille traditionnelle, la familiarité nourrit un mélange de mépris et de respect (respect pour les actes des personnes, pas simplement de façon aveuglément hiérarchique, combiné au mépris pour les personnes qui ne sont pas honnêtes ou qui manquent d’assurance). Quiconque possède un instinct sain constitue un réseau d’amitiés dans lequel il y a plus de respect que de mépris, et apporte ainsi un peu de stabilité à un monde instable. Mais à moins que de telles amitiés ne permettent de développer des capacités de questionnement sur elles-mêmes, de même que des rapports affectifs, et des problématiques qui génèrent des activités et des décisions, elles tournent de plus en plus à la spirale négative, engendrant davantage de mépris et moins de respect. Elles sont aussi pétrifiées que la traditionnelle hiérarchie familiale dont on espérait qu’elle appartiendrait au passé. La fidélité envers ces amitiés habituelles surpasse le désir de se libérer, lequel est inséparable de celui de contribuer à la libération de l’humanité. Certaines de ces amitiés spectaculaires développent une sorte de corporatisme, au sein duquel la fidélité implique une menace sous-jacente : si tu oses t’écarter du rang, nous nous liguerons contre toi, nous t’humilierons et nous te rejetterons. La fidélité est une belle chose, l’une des expressions élémentaires de la solidarité. Mais lorsqu’elle tourne à la loyauté envers des « amis » qui ont clairement trahi les perspectives constituant l’une des bases de cette amitié, elle devient en quelque sorte du masochisme, de l’auto-trahison qui vous irrite et vous tire vers le bas pour le restant de votre vie, à moins que vous rompiez expressément avec une telle loyauté humiliante. Cela ne veut pas nécessairement dire qu’il y ait forcément des solutions rapides à un tel conflit.

Cette mentalité de bande se manifeste souvent dans la façon dont les gens changent d’amis en fonction d’où le vent souffle : si le groupe s’oppose à celui qui était un ami, il faut alors choisir entre garder son intégrité et son indépendance pour faire les bons choix dans une situation complexe ou suivre silencieusement et adopter la position prise par le groupe. Une affection qui part si rapidement et facilement ne peut pas être authentique.

L’énorme intensification de la mentalité individualiste apportée par la répression et la marginalisation des communautés de luttes depuis les vingt dernières années ou plus, semble avoir eu paradoxalement pour effet de renforcer toutes les « collectivités » (depuis la nation jusqu’au couple traditionnel, de la clique jusqu’aux ONG) qui apparaissent comme des issues à l’individualisme bourgeois. Mais alors que le prolétariat semble refaire surface et cherche une nouvelle fois à intervenir dans le cours de l’histoire, le faux conflit entre individualisme et collectivisme semble aussi s’intensifier et fonctionner de façon encore plus complexe comme une force réprimant la lutte ayant pour objectif de constituer des communautés de reconnaissance mutuelle. Dans ce contexte, l’Aufhebengate a révélé ce qu’était l’attachement « loyal » de ces collectivistes qui soutenaient Aufheben – une sorte de foi aveugle dans leurs amis (comme la foi en Dieu ou en l’Etat, sans qu’ils soient testés de façon pratique). Dans le même temps, cela a révélé l’individualisme indifférent de ceux qui gardèrent pour eux leurs soupçons, ceux qui considérèrent de telles contradictions comme relevant d’une affaire privé, et gardèrent secrète leur critique d’Aufheben sans penser qu’une décision publique devait être prise. Dans les deux cas (l’auto-répression collectiviste ou l’auto-répression individualiste) le désir d’éviter la moindre avancée ou quelque bouleversement était nécessaire pour ne pas toucher aux idées convenues relatives à l’incontestable réalité.

11

Mi-octobre 2011, « ocelot », un contributeur régulier sur Libcom écrivit à propos de l’Aufhebengate : « L’enjeu ici sous-jacent, c’est la tendance de gens qui élaborent des politiques sophistiqués en temps de paix – c’est-à-dire dans des conditions dépourvues de stress – à se rabattre sur une politique inintelligente ou opportuniste au premier signe de l’apparition de problèmes. Sachant que la politique n’importe vraiment de façon effective qu’en fonction de la capacité de prendre des bonnes ou des mauvaises décisions dans les situations les plus désespérées, seule la politique « à l’épreuve du feu » est la vraie politique. Dans ce cas particulier, soumis à un stress relativement mineur dû à la menace détectée en ligne envers l’un de leurs amis et camarades, les personnes impliquées apparemment à la fois dans Aufheben et Libcom ont élaboré une politique intenable, due à leurs efforts paniqués de défense. Si vous ne pouvez même pas vous en tenir à une politique digne de ce nom sous l’effet d’un tel stress, quelle chance avez-vous de le faire quand des individus sont vraiment tués ou emprisonnés à vie ? Pire encore, l’expérience enseigne que certains individus sont tellement chancelants que, plutôt que d’admettre que certaines choses qu’ils ont pu dire sous l’effet du stress étaient des erreurs et/ou politiquement absurdes, ils passent ensuite le restant de leurs jours à essayer de réarranger leurs positions politiques pour justifier rétrospectivement leurs positions opportunistes prises hâtivement, sous la contrainte du moment. »

À l’aube de ce qui sera peut-être la plus grave crise mondiale (aussi bien économique qu’écologique et éventuellement militaire), on peut se demander comment ceux qui n’ont pas les nerfs ou la force de se confronter à un individu en leur sein qui épaule l’Etat, ou de s’opposer à ceux qui l’excuse, osent avoir la prétention de croire qu’ils puissent contribuer de façon significative au renversement du pouvoir d’Etat quand il s’attaquera à eux comme force extérieure beaucoup plus puissante.

friends

ou

Poll-tax-riots-kiss-001

Émeute de la Poll Tax, Trafalgar Square, Londres, 1990.

vancouver stanly cup riot kiss Emeute après la Stanley Cup de hockey, Vancouver, 2011.

_______________

« Les véritables amis vous poignardent dans le front », Oscar Wilde.

_______________

Il y aura sans doute des gens qui objecteront que tel ou tel passage est trop superficiel, pas assez équilibré ou « objectif ». Mais j’ai écrit ici dans la perspective suivante : « Si la chaussure te va, portes-la. » (Et pointe là dans la bonne direction.)

 

Comments

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.