film du soulèvement de Ferguson de 2014

6e anniversaire de l’insurrection de FERGUSON: un film.


Le 9 août 2020 était le 6e anniversaire du soulèvement de Ferguson de 2014. Voici un film intitulé “Toucher le Ciel: histoires, subversion et complexités de Ferguson”
(“Touch the Sky: stories, subversion & complexities of Ferguson”)


Pour les sous-titres français – cliquez sur CC en bas à droite.

Bande-annonce: https://archive.org/details/touch-the-sky-trailer


Site Web du film ici

vendredi 18 septembre, 19h
débat
sur l’actualité de la
contestation sociale aux USA
« Si nous brûlons, vous brûlez avec nous »
graffiti dans un quartier bourgeois de Saint-Louis
peu de temps avant que le système truqué du Grand Jury aux États-Unis
a décidé de ne pas poursuivre le flic qui a assassiné Mike Brown.
Histoires, subversions et complexités :
Projection d’une vidéo reflétant les moments
bruts des émeutes de Ferguson de 2014
Un film pour les sauvages, les anarchistes, les
enragés et les rêveurs…
Discussion sur la situation en 2014 et actuellement
suite à l’assassinat de George Floyd par un policier,
en présence d’un anarchiste des Etats Unis.
14 rue Ar. Ollivier qt Gares


Pour plus de détails sur le soulèvement et quelques commentaires critiques sous forme écrite en anglais, voir “Ferguson combat la peur avec le feu» (2014 – 2015)

Version français (Traduction Google):

foutre le feu aux flics à Ferguson

 

« Partout où vous trouvez de l’injustice, la bonne forme de politesse est l’attaque »

– T-Bone Slim


Scénario de film

 

[Ce film est composé uniquement d’images trouvées.

Aucune permission n’a été demandée ou accordée.]

En août 2014, des troubles sociaux ont explosé dans la ville de Ferguson, Missouri, [USA].

Certain·es aimeraient dire qu’iels l’avaient vu venir.

Que cette banlieue de St. Louis était unique.

Que c’était une poudrière.

Mais les conditions à Ferguson n’étaient pas particulièrement plus mauvaises que n’importe où alentour. Ou que n’importe où dans le pays, au fond.

Et ce n’est pas non plus dû au fait que les habitant·es de St. Louis auraient été de nature plus rebelle.

En fait, lorsque des émeutes ont éclaté à travers le pays, tant en 1968 qu’en 1992, St. Louis était connue pour sa « bonne conduite ».

La vérité, c’est que ça a explosé à Ferguson parce que des milliers de personnes l’ont voulu, tout simplement.

Personne ouvre sa gueule. Dans tout le pays, y’a personne qui réagit. Ici, on se laisse pas faire. Saint-Louis se laisse pas faire. J’étais là. J’y étais. C’est tout ce que je peux dire. J’étais là avec la communauté. C’est tout ce que je peux dire. J’étais là, aux côtés de la communauté. Tu vois, je pense pas que ce soit fini, honnêtement. Je pense qu’ils ont seulement eu un avant-goût de ce que riposter veut dire.

Ce film est né de nos expériences à Ferguson. Et nous espérons qu’il parlera à celleux d’entre nous qui désireraient voir l’esprit de ces quelques mois durer une vie entière.

[9 août 2014]

[Attention, les images qui vont suivre peuvent choquer.]

J’ai vu un homme se faire descendre. Genre, il l’a juste buté, putain. Point barre. C’était pas pour essayer de se protéger ou quoi, il l’a tué.

La police a juste tué cet homme sans raisons.

Vers 2 heures, une tempête de protestations s’est élevée de la foule. Des centaines de personnes ici, très affectées par ce qu’il s’est passé. La situation reste explosive.

Me calmer ?! Ce fils de pute a tiré 8 fois sur mon bébé ! Me calmer ?! Va te faire foutre ! Pigé ?! Me dire de me calmer putain ?!

La foule était de plus en colère, quelqu’un tirant même des coups de feu. Pendant ce temps, le corps de Brown gisait dans la rue pendant des heures.

 

À la nuit tombée, il y avait de plus de plus de gens en colère contre la police. Nous avons rapidement quitté les lieux parce qu’il y avait un feu de poubelle.

Ils ont lâché les chiens sur tout le monde, sérieux. On n’a rien fait. Et puis [les flics de] Ferguson sont arrivés. [Les flics de] Ferguson sont partis. Sérieux, [les flics du] comté sont arrivés, ils ont fait partir [ceux de] Ferguson. Ils ont pris le contrôle. Je te parle d’inspecteurs, de la police d’État, et tout et tout. Ces fils de pute de St. Charles, ils étaient tous là, sérieux.

Pitié, ne me tue pas ! Ne nous tuez pas ! Mets tes mains en l’air !

Ayez une pensée pour ma famille dans vos prières, parce qu’on traverse une période difficile. On vient de perdre notre cousin préféré Mike Mike.

Un p’tit gars de 17 ans, désarmé, s’est fait tirer dessus 9 fois par la police.

Mon négro était déjà à genoux, genre « ça rigole pas ! ». Tu vois ? « Ne tirez pas. » Déjà ses mains en l’air. Allez, sérieux mec ! C’est quoi ce bordel ?!

Ils ont descendu un p’tit négro pour rien aujourd’hui. Nique les keufs !

Maintenant il est parti. Il me manque, genre, beaucoup.

Tu sais ce que j’en dis ? Nique la police ! C’est clair.

Ma ville est pourrie, mec. La police en tout cas.

Là maintenant, St. Louis est déchaînée.

Vous allez lâcher les chiens, les M-16, les AR-15 et tout le gros matos ? Ah ouais ? On peut aussi jouer ce jeu-là!

Nique la police. On va faire la guerre à ces fils de pute. On les emmerde, tu m’entends ? Thug life, mec. Merde. Négro, on les emmerde.

[Touch the Sky

Histoires, Subversions et Complexités de Ferguson]

[1.

L’histoire]

[10 août

Jour 1]

[Commissariat de Ferguson]

On veut des réponses ! On veut des réponses !

[Immeubles de Canfield Green]

C’est n’importe quoi, mec. C’est pour ça que tu vois tous ces gens ici, là maintenant. Tous ces gens. A cause de ce qu’il s’est passé.

Là je suis en route pour voir tous les gens venus pour la veillée aux chandelles.

Où sont les miens ? Tout le monde est là aussi. C’est sérieux.

Au bout du compte, ils vont subir les conséquences de tout ça, mon dieu. Voilà, C’est tout.

Pas de justice, pas de paix ! Pas de justice, pas de paix !

On est dans les rues en ce moment. C’est clair. Pour les potes décédés. Stop la violence, mec. Franchement, mec. Stop la violence, mec. Franchement.

Canfield et West Florissant. Ils ont tué ce gars ici à Canfield. Tout le monde part en live, putain. On va tout faire péter, putain. On en a rien à foutre.

Eh Mec, quoi de neuf ? Pas de justice, pas de paix, mec. C’est comme ça à St. Louis, mec. On en a marre que la police tue nos jeunes frères noirs, mec. Voilà c’que c’est, mec.

Beaucoup de flics devant. Je sais pas c’qui se passe ici, mais on est là. On est sur [l’avenue] West Florissant.

Ne lancez rien !

Les gens commencent à lancer des trucs.

Quoi, il va rester posé tranquillement à la maison ? Il va être payé pour tuer ce jeune homme ? C’est mon fils, c’est ton fils, ce sont tous nos fils !

On représente pour la communauté : caucasiens, afro-américains, asiatiques, tout le monde, peu importe de quelle couleur tu es.

Mec, ils mettent le paquet. C’est abusé. Aïe, aïe.

Là ils balancent des trucs sur les voitures de police. Ils cassent des trucs. Pas de justice ! Il n’y a pas de justice. Pas de putain de justice. Pas de justice, pas de paix.

Nique la police !

On est ici [à la station-service] QuikTrip où les incidents ont commencé. Ça pille et saccage le QuikTrip. Wouah !

C’est le délire, putain !

Oh, mec ! Pillage et saccage.

Vise le QuickTrip. Oh mon dieu ! Où sont les tickets de lotto?

Ils ont détruit ce fils de pute. Ils ont détruit… hey, passe-moi cette bouteille !

J’ai parlé avec une fille de 13 ans qui habite ce quartier. Tu disais avoir peur. Qu’est-ce que tu vois ?

Je vois des gens faire des choses, comme entrer par effraction dans des magasins et ce genre de trucs, et juste faire des mauvaises choses. Ils détruisent tout.

Viens pour Mike Mike. Prie pour St. Louis. On est là. On est à fond comme jamais. Tout St. Louis est venu pour les faire chier.

C’est clair. Justice pour Mike Brown.

Justice !

Les gens repartent avec ça maintenant. On a des packs de bière. C’est dingue, mec.

Ils pillent le QuikTrip.

2014.

Les gens courent à l’intérieur maintenant.

Pas un coup de feu, c’est pas un coup de feu.

Pas un coup de feu. Des feux d’artifices.

Juste un feu d’artifice.

Ils foutent en l’air le QuikTrip. Ils le foutent en l’air. Waouw !

Hey, QuikTrip. West Florissant. Tout gratos. J’te jure négro. Vrai de vrai.

C’est là qu’est tout l’argent à l’intérieur, mon gars.

Pousse ce fils de pute par la fenêtre.

Maintenant écoutons le témoignage de Robert Cotton au téléphone. Je crois comprendre que vous êtes sur place, Robert. Dites-nous ce que vous voyez.

J’ai marché jusqu’au QuikTrip qui a été pillé. Un gars avait arrêté son pick-up devant et ils essayaient de charger un distributeur de billets de la US Bank.

Il embarque le distributeur avec sa propre voiture.

Prend ce putain de truc, négro !

Oh mon dieu. C’est une putain d’émeute à grande échelle. Il n’y pas d’autres mots. Regarde-moi ça. Ils courent. Je sais pas de quel magasin d’alcools il s’agit sur West Florissant.

Sam’s Meat Market and More [Viande et alcools]

Bon dieu, merde. Et voilà comment tu sais qu’il est temps de partir. Les gens font du 150 km/h. Merde.

Et ils courent à l’intérieur. C’est comme… surréaliste, putain. [Les émeutes de] Los Angeles 1992. C’est tellement triste, mec.

Des gens sortent de là avec des steaks plein les bras. Ils mettent le feu aux poubelles. Et tu sais, ils s’en moquent. Tu vois, ils se disent : « Hé, la police ne nous arrête pas. On va le faire. »

J’ai été direct au putain de magasin de produits de beauté. Les fils de pute sortaient de là avec des gros sacs [d’extensions pour cheveux de la marque] Kanekalon et toutes sortes de trucs. C’est dingue ! Sérieux !

En ce moment, c’est la mêlée générale ici. Tout le monde court simplement à l’intérieur et attrape ce qu’il peut. Il n’y a pas la moindre police sur place. Je n’ai rien vu de tel depuis [l’ouragan] Katrina à la Nouvelle-Orléans.

Ouais, et on dirait qu’un individu se trouve en plein milieu de la route au téléphone, en train de danser, de faire n’importe quoi. Je n’ai aucune idée de ce qu’il en est.

Des nouvelles concernant des coups de feu cette nuit ?

Nous ne pensons pas que quiconque se soit fait tirer dessus. Par contre, nos gars ont entendu des coups de feu toute la nuit. Et on est certain que l’hélicoptère a été visé au moins une fois.

Eh bien, Sharon, j’étais sur West Florissant et Canfield, mais mon cameraman Alonzo et moi avons dû quitter la zone. Pendant que nous tournions des interviews et des vidéos, nous avons constaté que notre fenêtre avait été brisée.

R.I.P. QuikTrip.

Le QuikTrip est en feu.

En train de brûler complètement.

C’est en flammes.

Waouw.

Hé, vous feriez bien d’appeler les pompiers !

Brûle ce fils de pute jusqu’au bout !

On n’a pas besoin d’eau, laisse-le cramer putain.

Il semble que le pillage se soit propagé à [d’autres petites villes comme] Jennings, Dellwood, d’autres parties du comté de St. Louis. La plupart de ces gens ont sans doute simplement vu ça à la télé et ce sont dit, hé, qu’ils allaient y aller et participer.

Les gens font des allers-retours en courant avec des boites d’extensions capillaires, et tout ce sur quoi ils peuvent faire main basse ici. J’ai vu des enfants d’environ 10 ans à peine rentrer dans ce magasin.

Le Walmart a été pillé. On nous a informé que les employés ont été contraints de se mettre à l’abri un peu plus tôt, et puis les flics ont été encerclés par des pillards.

Je vois beaucoup de gens avec de l’alcool, assis sur leur voiture. On dirait qu’ils encouragent les autres.

Ils rentrent dans ce fils de pute ! Ils sont à l’intérieur ! Putain !

Oh, il est passé à côté de lui.

Sors de là, mon gars !

Gooo, négro ! Sors, négro !

Il était déjà au sol, mec !

[11-13 août

Jours 2-4]

Et vous avez une situation de crise sur les bras, monsieur le maire. C’est certain. Combien de commerces ont été pillés en tout la nuit dernière ?

Les évènements ont commencé ici même, au QuikTrip de Ferguson. Mais ça s’est propagé à [la ville de] Dellwood – de nombreux commerces à Dellwood ont été endommagés. C’est ensuite revenu à Ferguson où se trouve le [supermarché] Walmart. Avant de prendre ailleurs dans le comté de St. Louis, là où se trouvait le [supermarché] K-Mart. Et puis, ça c’est propagé plus loin à l’est vers [la vile de] Moline. Donc, vous voyez, c’était à l’échelle régionale dans la zone nord du comté de St. Louis.

Je parle avec deux autres messieurs ici. L’un d’eux dit avoir participé la nuit dernière, vous faisiez partie du groupe qui a en fait empêché la circulation d’entrer. Brièvement, votre réaction à tout ça, pourquoi ?

Je crois que ça devait arriver. Je crois qu’ils sont trop préoccupés par ce qui arrive à leurs magasins et leurs commerces. Ils ne sont pas préoccupés par le meurtre. Moi, c’est ce qui m’inquiète.

Et vous, très brièvement, vos impressions ?

Je pense seulement que ce qu’il s’est passé était nécessaire. Pour montrer à la police que, vous savez, elle ne dirige pas tout.

Je pense qu’ils n’en ont pas fait assez.

(187 [code pour meurtre] Police régionale)

(Nique la police)

(Balances)

La supérette QuikTrip, qui a été incendiée samedi soir, est devenue un point de ralliement pour les manifestants.

Tu peux pas continuer à dire à ces gars : « Tais-toi. Ne jure pas. Remonte ton froc. » Et ci et ça. C’est leur vie quotidienne, ça. Et ils sont furieux. Ils sont furieux. Je suis furieux. On devrait tous être furieux. On devrait tous être en colère à cause de ce qu’il se passe.

On sera là pendant deux semaines s’il le faut. Ça va pas retomber. Ça, non. Vous devez tous arrêtez de faire ça.

Mike Brown ! Mike Brown !

Anne Allred est en ligne. Il semble qu’elle soit avec le maire de Ferguson en ce moment, qui a été la cible de menaces de mort, et d’un piratage de la part d’un groupe international appelé « Anonymous ». Qu’en est-il, Ann ?

[James Knowles III, Maire de Ferguson]

Vous avez peur ?

Ah, ma famille est un peu effrayée. Moi pas, vous savez. La plupart des personnes qui ont appelé, vous savez, elles appellent, elles raccrochent. Il y a beaucoup de lâches là-dehors.

(Le seul bon flic est un flic mort)

Et les services de la ville ont été piratés, apparemment. Internet est hors service, les emails sont HS, les téléphones sont HS, les lignes fixes dans la ville, les pompiers, la police, la mairie.

Ben heureusement, je veux dire, on a les gsm et les sms. Vous savez, ils ne peuvent pas – enfin ils n’ont pas encore piraté ça, je ne devrait pas dire que ce n’est pas possible.

Anonymous a toutes leurs adresses. Anonymous a des photos de leurs femmes, de leurs enfants. J’ai vu leurs maisons. Si j’avais vraiment envie de me mettre en colère là, je pourrais. Qu’il le laissent courir, ce type. Qu’ils l’acquittent comme Zimmerman, et tu verras comme ça va péter. T’auras plus de raisons de sourire.

Il ne s’agit plus seulement de Michael Brown. C’est plus important que ça. Il s’agit de l’injustice qui est faite à tous les hommes noirs tués par la police.

Je souhaite qu’on puisse diffuser ça à tout notre peuple. Ce n’est pas du tout noir contre blanc : c’est le gouvernement contre le peuple. Mais ils vont commencer par ceux qu’ils appellent la minorité.

Il ne s’agit pas de race. Je n’ai pas de problème avec les blancs. Là, c’est une question d’insignes. Ils font absolument tout ce qu’ils veulent, putain. J’ai le sentiment qu’il n’y a pas de police raisonnable. Vous les gars, vous faites sauter la cervelle des enfants en pleine journée.

Salut ! C’est moi et DeAndre.

Comme je disais, cette affaire Michael Brown est juste devenue incontrôlable. Enfin, Caleb faisait quelque chose à la manif’…

J’ai les mains sur la tête !

S’il vous plaît ne me tuez pas !

Justice pour Mike Brown ! Justice pour Mike Brown !

Je crois comprendre qu’en tant qu’adulte, on est censé dire des choses comme, « Nous n’approuvons pas les émeutes. » La seule raison pour laquelle j’ai su ce qu’il se passait, c’est parce que le QuikTrip a cramé. Personne n’écoute une manifestation pacifique.

On est chaud !

Nous sommes Mike Brown ! Nous sommes Mike Brown !

Obama tu n’as rien fait ! T’as changé quoi ? Tu n’as rien changé ! T’as changé que dalle ! Je vous emmerde tous !

Houlà ! Houlà !

Ne tirez pas !

« Dispersez-vous immédiatement. Ceci n’est plus une manifestation pacifique. »

Ils ont le pouvoir total sur nous. Ils sont comme des dieux. S’ils te disent de ne pas faire quelque chose, tu ne peux pas le faire. Et si tu le fais, ils te traitent comme un chien. Tu seras abattu – enfin, en tout cas pour un noir. Je ne suis pas sûr que ce soit le cas pour tout le monde, mais moi je crois ça. J’espère que ce n’est pas comme ça pour tout le monde. Ça devrait pas, ça ne devrait être comme ça pour aucun être humain sur cette planète.

Ce type est tellement éloigné. Regarde, je vais te montrer. Le QuikTrip est là, le type qui a le point rouge sur lui est ici. Les policiers sont là.

C’est la cinquième nuit d’affrontements entre la police et les gens dans les rues de Ferguson.

Par ici, par ici ! Ils nous lancent des putains gaz lacrymos !

[Les pillages de magasin se répandent]

Ce n’est pas seulement le QuikTrip que ces suspects ont pillé, et ce n’est pas uniquement Ferguson. Ce soir nous allons examiner de plus près tous les endroits touchés dans le comté de St. Louis.

La police enquête sur un cambriolage dans le nord du comté. Il s’est déroulé autour de 00h30 au [magasin d’alcools] Randall’s Wine & Spirits sur Old Halls Ferry.

Voici le Phillips 66, une station-service non pas dans la ville de Ferguson mais dans la ville de St. Louis. Et elle a été pillée.

La police [de la ville] de Brentwood me dit qu’ils ont attrapé un groupe de jeunes hommes juste à côté [du magasin] True Runner, les bras chargés de chaussures de tennis.

Un cambriolage de magasin pendant la nuit dans le sud de la ville, probablement inspiré par les pillages de Ferguson.

Plus de 30 jeunes ont cambriolé le Shoe Carnival [sur l’avenue] Gravois près de [celle de] Grand. C’est une tout autre partie de la ville.

La police affirme qu’autour de minuit, une dizaine de voitures se sont arrêtées, [ils] sont entrés le visage masqué et ont volé toute la marchandise qu’ils pouvaient.

La police affirme que les criminels utilisent tout ce qu’il se passe à Ferguson comme une opportunité pour commettre des crimes.

[14 août

Jour 5]

[Jay Nixon

Gouverneur du Missouri]

J’annonce aujourd’hui que la Police Routière du Missouri, sous la supervision du Capitaine Ron Johnson, qui a grandi dans cette région, va diriger l’équipe qui assurera la sécurité à Ferguson.

[Ron Johnson

Capitaine de la Police Routière de l’État du Missouri]

J’ai grandi ici, et c’est à l’heure actuelle ma communauté et ma maison. Et par conséquent cela compte beaucoup pour moi personnellement de rompre ce cercle de violence, d’apaiser les tensions et d’établir la confiance.

L’atmosphère est tellement différente maintenant. On vient d’être briefé par Ron Johnson. Il nous a dit, une atmosphère totalement différente pour ce soir. Les agents ne porteront pas de masque à gaz. On a vu moins d’agents que lors des derniers jours. Et ceux qu’on a vu n’étaient pas lourdement armés. Ils portaient seulement leur uniforme comme s’ils patrouillaient.

Je comprends que tout le monde soit super excité, et « à donf » comme disent les jeunes. Mais ne soyez pas à donf au point d’être hors de contrôle. Certains veulent que vous fassiez ça. Ça détourne l’attention de Mike Brown. Concentrons-nous sur Mike.

Mains en l’air ! Ne tirez pas !

Mains en l’air ! Ne tirez pas !

Je t’aime, gars.

-Je t’aime aussi, mec.

-C’est énorme. C’est comme ça qu’on voulait que ce soit. Énorme.

-Quoi de neuf ? Tu veux parler de ce qui se passe ici ?

-Vous venez d’où ? Quelle chaîne ?

-On est de Vice News.

Vice ?

Vice.

Oooh mec, je regarde tout le temps Vice.

Oh, cool.

Meeeec, je suis sur Vice ?! Me voilà. J’adore Vice. Je vais sur Youtube au travail. Mon patron est parfois en colère contre moi parce que je suis sur Vice. C’est sérieux. Je plaisante pas.

C’est une démonstration pacifique en cours, même si… turbulente.

Ouais, ouais, ouais !

Ne tirez pas !

Je ne vais pas tirez. Ça va bien se passer.

Mains en l’air.

Je suis tellement fière de vous.

Manifestation pacifique. On aime tout le monde.

Que pensez-vous de toute cette foule, tous ces gens autour de vous, qui vous entourent comme ça, qui vous soutiennent ?

Je crois que leur voix est entendue. Je crois que c’est tout ce qu’ils – Bref c’est ce qu’ils veulent.

Quel est son nom ? Quel est son nom ?

[15 août

Jour 6]

[Tom Jackson,

Préfet de police de Ferguson]

Donc, je suis ici pour parler de deux choses. Ce que nous rendons disponible aujourd’hui sont les enregistrements du dispatching et la séquence vidéo d’un vol – un vol avec violence – avec usage de la force, qui a eu lieu dans une épicerie locale.

D’après la police, elle montre Michael Brown dans une épicerie peu de temps avant la fusillade. Il entre, vole une pile de cigares Swisher Sweet.

Euuuh… Désolé… Le policier impliqué dans la fusillade de euh… Michael Brown est Darren Wilson. D-A-R-R-E-N Wilson, W-I-L-S-O-N. Et euh, merci… et à plus tard.

Six jours pour mettre au point ce mensonge, et ça ne marche toujours pas. Ils disent que d’la merde, tous là-bas à Ferguson.

Venir ici et ne communiquer aucune information, aucun rapport d’incident au sujet du meurtre, mais communiquer des informations disant « Eh bien, Mike n’était peut-être pas un homme parfait », c’est consternant.

Je pense faut venir ce soir, une fois que les gens commencent à rentrer du boulot et qu’ils captent ce qu’il nous a été dit à la conférence de presse. Je suis pas sûr que ça va être la même chose que ce qu’on a vu la nuit dernière.

(N.W.A. avait Raison!)

J’attends tout simplement. Ils parlent de tout foutre en l’air encore une fois ce soir. Donc, j’y serai. Je m’suis chopé des Jordans. Tu vois ce que j’veux dire ?

Nique la police. On est là. On est plus nombreux que vous tous. Vous maîtrisez que dalle, sérieux. Vous pouvez rien faire.

Ils balancent des lacrymos. Ils recommencent avec cette merde.

Ils ont dit « On s’en va ». Voilà ce qu’ils ont annoncé, « On s’en va ». Aussitôt que tout le monde a commencé à applaudir quand ils ont dit qu’ils partaient, ils ont commencé à balancer tous ces trucs. Et puis ils se sont taillés. C’était comme une putain de fusillade de leur voiture. C’est quoi ce bordel ?

Nique les keufs ! Nique les keufs !

Mains en l’air, ne tirez pas !

« Évacuez la rue immédiatement ! »

Allez tous vous faire foutre !

On vous attend tous ! On vous attend !

Ça a commencé pacifiquement. C’est clairement plus le cas, putain.

C’est chaud ! C’est chaud !

Éteint la putain de caméra ! Éteint la caméra, mec !

Holà, stop ! Barrez-vous, avant qu’il soit trop tard mec. Juste, tirez-vous. Cassez-vous d’ici.

Il est 2h30 du matin et sur West Florissant Avenue c’est la mêlée générale. Les pilleurs vont et viennent par les fenêtres brisées des commerces, et semblent n’avoir aucune crainte d’être arrêtés. En ce moment, les agents de Ferguson et du comté ont reçu l’ordre de faire profil bas.

[16 août

Jour 7]

Pour protéger les personnes et la propriété de Ferguson aujourd’hui, j’ai signé un arrêté déclarant l’État d’Urgence et ordonnant l’instauration d’un couvre-feu.

Nous allons appliquer ce couvre-feu en vue d’assurer la sûreté et la sécurité dans la région.

Allez-vous rentrer à la maison ?

Demandez-vous tous, allez-vous tous rentrer à la maison ?

Personne ne rentre à la maison ce soir.

Ça va péter.

Donc, vous savez qu’il y a un couvre-feu en vigueur à minuit ce soir ? Vous êtes au courant ?

J’irai en prison.

Vous êtes prêt à aller en prison et rester ici ?

Je suis prêt à aller en prison.

Et que vous disent les autres personnes dans cette foule ?

Ils vont allez en prison aussi.

D’accord, merci pour cet échange ce soir.

On ira tous en prison.

Bien, donc voici le témoignage de ce monsieur ici. Merci d’avoir parlé avec nous.

Avez-vous l’intention de respecter ce couvre-feu ?

Je veux dire, j’ai pas le choix, parce que j’essaye ne pas d’aller en prison, y’a pas moyen. Mais ouais, je vais le respecter, mais je ne l’approuve pas.

Aaah mec, je pense que c’est d’la foutaise. Je bouge pas.

On est des putains d’adultes. Y’a pas moyen qu’on ait un couvre-feu.

(Les flics tuent des enfants)

Mec, merde. On ira nulle part. Tu vois ? Regarde, tout le monde est là. Il est presque minuit, bordel, alors mec, c’est à eux de voir. Je pense qu’ils bluffent.

Alors, à quoi vous vous attendez tous cette nuit quand les flics vont venir ?

On s’attend à tout !

Tout ! Ils ont des flingues, on a des flingues ! On les emmerde !

Vous pensez que ça va demander quoi pour améliorer la relation entre les flics et les gens ici ?

Rien ! Rien du tout, putain !

Les manifestants ont refusé de partir, malgré les appels à rentrer à la maison lancés par les hommes du Black Panther Party.

Je vous en supplie ! S’il vous plait, n’avancez pas plus.

Chacun voit ça comme il veut : si on demandait à tous de partir, d’arrêter à minuit, alors ce serait la défaite de ce qu’il s’est passé durant toute la semaine.

Ils ne nous feront pas bouger ! Je suis désolé, c’est non ! J’en ai rien à foutre de l’heure qu’il est, 00h10, 00h05, 00h50.

Pas de justice, pas de paix ! Rien du tout ! Vous bougez tous, on bouge. Vous tirez tous, on tire !

« Ici la police. » « Vous êtes en violation du couvre-feu décrété par l’État. »

Mes mains en l’air ! J’essaye de toucher le ciel !

Nique les keufs ! Nique les keufs !

De l’eau, il a besoin d’eau ! J’en ai.

Mets ce truc dans tes yeux.

Nettoie ça de tes yeux.

Yo, ils se faufilent par l’arrière !

Ils arrivent par l’arrière !

Bordel, ça venait d’où ?

Ils ont commencé à tirer des balles. Et…

Qui a commencé à tirer ?

Certains des manifestants. Et quelqu’un, l’un des manifestant, a fini par être touché.

[17-19 août

Jours 8-10]

Ils veulent la guerre ! Laisse-moi te montrer ce qu’ils m’ont fait quand j’avais 17 ans. Ils m’ont fait ça quand j’avais 17 ans ! Ils m’ont tiré dans le dos, explosé la hanche !

Ne dites pas que vous allez nous tirer dessus, putain ! On est pas en Irak, putain. C’est le putain de comté Nord, ici !

Ils nous brisent. Ils essayent de nous enlever chaque droit en tant qu’être humain.

C’est nous contre la police. C’est exactement de ça qu’il s’agit. C’est pas une question de race. C’est l’Amérique contre la police, tout simplement.

Je sais pas si vous pouvez voir, mais c’est un embouteillage d’une distance d’au moins 5 terrains de foot. J’ai vu un gars courir avec un cocktail Molotov.

Ils barricadent la rue avec toutes sortes d’objets : des cônes, des briques, des poubelles. Avec les mains en l’air.

St. Louis en force, baby !

St. Louis est là !

« Vous devez quitter la chaussée. Dégagez de la chaussée. Enlevez les objets de la chaussée. »

Ça ressemblait à des coups de feu. Une bouteille vient d’être lancée.

Lacrymos tirés !

Tous ceux qui sont allés à ces manifestations comprennent qu’il y a une dynamique dangereuse à l’œuvre cette nuit. Elle permet à un petit nombre d’agitateurs violents de se cacher dans la foule et d’essayer de créer le chaos.

Attention Chris.

Vous savez quoi ?

Des manifestants nous balancent des pierres.

Et c’est une autre chose que nous avons vu davantage cette nuit, Chris. Des gens portant des masques.

Ouais.

Il ne s’agit plus seulement de Mike Brown !

C’est ce dont on parle !

Il ne s’agit plus seulement de Mike Brown. Il s’agit de tous les gens.

Mains en l’air ! Ne tirez pas !

Des centaines de manifestants ont marché en direction de l’emplacement du commissariat. Plusieurs cocktails molotov ont été lancé contre la police.

Les autorités ont annulé la rentrée scolaire. Il y a une zone d’exclusion aérienne au-dessus de la ville. La Garde Nationale est bien là pour rester.

[A l’autre bout de la ville…]

[19 août

Ville de St. Louis, partie nord]

C’est le gars qui vient juste de voler le soda dans le magasin. Et il est genre, « Je les emmerde. »

Je suis sur Instagram. Je suis sur Facebook. Vous savez qui je suis. J’en ai marre de cette merde.

Il en marre. Putain. C’est dingue !

La police va s’arrêter.

Vous avez appelé la police ?

On a appelé, ouais.

[Attention, les images qui vont suivre peuvent choquer.]

Sors les mains de tes poches !

Il a sorti son flingue.

Bute-moi ! Bute-moi !

Oh merde.

Bute-moi !

Lâche ton arme !

Oh merde.

Bute-moi maintenant, fils de pute !

Lâche ton arme !

Oh merde.

Lâche ton arme !

Oh merde. Ils ont dégainé leurs flingues

Lâche-le, frère !

Putain.

C’est pas vrai!

Oh mon dieu. Ça recommence. Ils viennent de tuer cette homme.

Pour une putain de sucrerie. Cette merde pour…

Pour deux putains de sodas, les gars.

Ils disent qu’il a volé. Donc, il a quitté le magasin une première fois. Ils ont laissé tomber. Il est revenu dans le magasin. Alors je suppose qu’ils ont appelé la police.

Il avait un tout petit couteau, à peu près cette taille, comme ça. Touuut petit.

C’est du sérieux dans ma ville, gars. St. Louis, tu vois ce que je veux dire ? Faut qu’ça bouge. C’est du sérieux, putain.

Vous allez rester ici toute la nuit, vous tous ?

Oh ouais.

Vous avez des armes ?

Ouais, j’en ai une belle.

C’est quoi une belle arme ?

J’ai un M-16.

Vous allez vous en servir ?

S’il le faut.

J’espère que non. Je vois, mais j’espère que vous n’en aurez pas besoin.

Suffisamment de gens sont morts.

Je ne veux pas d’ennui. Je veux que ça reste paisible avec les gens.

[Plusieurs semaines après…

8 octobre

Ville de St. Louis, partie sud]

Escalade de la tension cette nuit dans le sud [de la ville de] St. Louis. Et ce, quelques heures après une fusillade ayant impliqué un agent de police, au cours de laquelle un homme a été tué.

Comment vous avez pu tuer ce petit garçon ? Vous avez pas fini de tuer les bébés des gens ?

Il y a quelques minutes à peine, nous étions très proche de plusieurs coups de feu. Tout ça s’est produit après que la foule ici présente devienne très sauvage, très rapidement.

(Chantent:) Move, bitch ! Get out the way ! Get out the way, bitch ! Get out the way !

Un vrai porc ici ! Une vraie salope ! Ta vie est en danger, mon pote ! Tu ferais mieux de partir !

Sortons tout le monde d’ici.

Tire ! Tire !

Putain de couille molle de petit blanc !

A nous la rue !

Foutez le camp d’ici !

Foutez le camp d’ici !

Foutez le camp d’ici !

Foutez le camp d’ici !

Allez vous faire enculez !

A qui la rue ? À nous la rue !

A qui la rue ? À nous la rue !

Ces fils de pute, ouais ils sont dingues. Ils pensent qu’on va juste rester là et supporter ça. Y’a pas moyen.

[9 octobre]

Pour la seconde nuit consécutive dans le quartier Shaw du sud de [la ville de] St. Louis, des manifestants ont bloqué des rues. Certains ont même brûlé l’un des symboles de notre pays, le drapeau américain.

« Veuillez vous disperser sous peine d’arrestation. »

L’une des images les plus choquantes, selon le commissaire Sam Dotson : un couteau a été lancé contre un agent de police. Il a été touché à l’épaule, mais l’agent portait une veste de sécurité.

Des pierres et des briques ont été lancés contre des agents. Et même une vitrine de pharmacie a été brisée.

[Octobre-novembre]

[La tension monte alors que le tribunal du « Grand Jury » délibère sur l’inculpation ou non de l’agent Wilson…]

(En attente de la décision du tribunal d’accusation

Ferguson, Missouri)

Si on gagne pas ? Ça passera pas !

Si on gagne pas ? Ça passera pas !

Si Mike gagne pas ? Ça passera pas !

Avec ce genre d’énergie, c’est vraiment difficile de savoir ce qui se passera quand la décision va tomber.

Me touche pas putain ! Me touche pas putain !

Reculez !

Vous êtes en état d’arrestation !

Je vois rien ! Enlève ça de ma vue !

Il y a trois mois, vous me disiez, ici même, que vous pensiez que les choses vont changer. Qu’elles ne peuvent pas rester les même. Vous pensez toujours que les choses vont changer ?

Oooh, non.

Non ?

Non. Il y aura une émeute bis.

Ouais ?

Ouais.

La coupure de courant le soir d’Halloween à Ferguson était l’acte délibéré d’un vandale. Peu après 20h00 vendredi, une grande partie [du quartier de] Old Ferguson a été plongée dans le noir. Même le quartier général des pompiers et de la police de Ferguson n’avaient plus de courant – ce qui était peut-être l’objectif, selon certains.

Après que ce soit arrivé et que j’aie regardé dehors, dans la maison on a tous décidé que c’était les manifestants.

On va tout renverser ! On va renverser toute cette merde !

(Nous sommes une grande force)

J’ai les mains sur la tête ! Pitié ne me tuez pas !

Aussi, ce que vous voyez –

Fuck CNN !

Une fois de plus, comme on le disait au début de cette émission…

Pas de justice, pas de paix !

Pas de police raciste !

La guerre ! La guerre ! La guerre !

Les commerces par ici ont commencé à barricader leurs fenêtres. Et le gouverneur Jay Nixon a même appelé préventivement la Garde Nationale. Il y a dans la région de Ferguson et de St. Louis 1000 Gardes Nationaux, 100 agents de FBI, et des centaines d’agents de police venant de l’État entier, au cas où ça tourne mal.

On ne tourne pas la page de quelque chose comme ça. Avec le cas Trayvon Martin, ils ont tourné la page. Et ils ont laissé un truc du même genre se passer à nouveau.

S’il s’en sort, impossible de dire ce qu’il va se passer.

La police de St. Louis signale que deux hommes ont tagué les murs d’un portail en pierre du [boulevard] Flora Place avec un message menaçant.

(SI ON BRûLE, VOUS BRûLEZ AVEC NOUS)

Avec les tensions déjà en hausse, le graffiti dans le quartier de Shaw ne fait qu’aggraver l’anxiété.

Des personnes visitant le Compton Hill Reservoir Park furent surprises de voir que quelqu’un avait vandalisé la Naked Truth Statue – [Statue de la Vérité Nue] – en taguant « FTP » – [Fuck The Police] – un message anti-police – sur son torse.

C’est une honte.

[24 Novembre]

Il s’adresse à vous tous en ce moment. Il vous aime tous, vous tous. Il vous aime tous. Je suis sérieux. Je suis ici, là maintenant, une putain de sortie hors du corps.

Ils se préparent à la guerre depuis quatre ou cinq mois. Tu m’entends ? On vient de passer devant [le grand magasin] Target. Ils ont deux chars. Et il y avait la police en train d’armer leurs flingues en nous regardant.

(Je suis Mike Brown)

Les tensions, bien sûr, sont très sérieuses. Vous entendez ça dans à peu près toute la région de St. Louis, alors qu’on attend l’annonce du tribunal d’accusation ce soir.

Ce que je pense qu’il va arriver ? Ça va péter. Parce que je sais déjà. Le verdict est –

Qu’est-ce que tu veux dire ça va –

Il n’est pas inculpé.

Qu’est-ce que tu veux dire par ça va péter ?

Ça va péter ça veut dire, on va pas tolérer ces conneries.

A présent, le procureur Bob McCulloch prend place au micro.

Merci pour votre patience. J’arrive un peu tardivement.

On vous aime Miss Lesley. On vous aime Miss Lesley.

Chhhht, écoutez, écoutez, tous.

Après avoir examiné les faits en profondeur, le tribunal d’accusation a délibéré durant deux jours, prenant leur décision définitive.

Ils ont tort.

Vous savez tous qu’ils ont tort !

Ils ont établi qu’il n’existe pas de motif suffisant pour introduire une quelconque accusation contre l’agent Wilson.

On va obtenir justice ! On va obtenir justice !

Nique la police !

C’est des vraies conneries, frère.

Pas de justice, pas de paix !

C’était l’enfant de quelqu’un. Vous avez tué son fils, bordel !

Brûle ce fils de pute !

Brûle cette merde!

Donne-moi le truc ! Donne-moi le truc !

Brûle cette merde !

[Rue South Florissant]

Faut tout renverser !

« Dispersez-vous immédiatement. Vous êtes au milieu de la route. Vous êtes rassemblés illégalement. Dernière sommation avant arrestation. Faites-le maintenant. Arrêtez d’essayer de renverser la voiture de police. »

Les choses ont chauffé assez rapidement. Une voiture de police a été retournée. Plusieurs fenêtres sont brisées. Maintenant la police donne l’ordre de dispersion.

C’est rien comparé à la mort, à notre perte de quelqu’un de 18 ans. Perdre une voiture de police, c’est rien pour eux, mec. Ils doivent seulement sentir notre douleur. C’est pas simplement ce qui s’passe maintenant. Il s’agit d’années et d’années de ça, mec.

« Vous devez quitter la rue immédiatement et arrêter de lancer… »

« Vous devez sortir de la rue immédiatement, ou vous serez susceptibles d’être arrêtés. »

Bouge cette merde hors de ma vue. Sinon tu vas te faire défoncer.

« Vous devez arrêter de lancer des objets sur la police et vous disperser immédiatement. Faites-le maintenant. »

Défonce ce fils-de-pute !

« Arrêtez d’essayer de renverser le véhicule de police. »

Sérieux ?

Voilà ce qui est arrivé il y a quelques minutes. C’est un moyen de disperser les gens.

Renvoie cette merde ! Ouaiiis !

Fusées éclairantes, oh non.

Ils envoyaient des gaz lacrymos. Nique la police. Nique la police. Nique la police.

Laissez-la partir !

J’essaye de pas me chier dessus, j’ai tellement peur de vous tous avec vos flingues au milieu de la rue.

Sérieux je m’suis chié dessus.

Quelques fenêtres ont été brisées. Une voiture de flic s’est fait défoncer.

Bouge cette foutue caméra hors de ma vue. Je suis en train de crever sale fils de pute. Merde !

Il y avait beaucoup de gaz. On a été gazé direct par la police.

Maintenant la situation semble se dégrader très, très rapidement.

Putain de merde !

Une voiture de police a été incendiée. Toute la police bat en retraite. Je suis plutôt certain que ce bruit est celui de balles, vous savez, de munitions, qui explosent dans la voiture. Et ce vacarme, c’est son klaxon.

Pour l’instant, nous savons qu’il y a des pillages en cours. Les gens ont commencé à se mobiliser, à prendre leur voiture et à se déplacer dans différents coins.

Putain ils sont à l’intérieur, gros. Ils prennent tous les trucs de partout. Pour sûr, le pillage a commencé putain.

[La parapharmacie] Walgreens est bel et bien en feu.

Ils l’ont incendié ce fils de pute. Tout le putain de Walgreens.

J’adore ça !

Moi aussi j’adore ça !

Brûle cette salope.

Brûle ce fils de pute jusqu’aux cendres.

Oh, merde, attends. Ils essayent de rentrer dans ce putain [de magasin] d’Aaron’s ? Ok, alors, merde. On chie sur la location-avec-option-d’achat, on va plutôt prendre l’option choper-sans-payer tout court.

C’est pas bon. C’est pas bon. C’est pas bon. C’est… argh haaaa –

Vous allez bien ?

[Avenue West Florissant]

L’un de nos reporters disait que c’était du gaz lacrymogène, mais c’était l’un des – C’est parti.

Et maintenant le [magasin de viandes et alcools] Ferguson Meat Market & Liquor est touché. Ils ont abandonné la fenêtre du McDonald. Mais on dirait qu’il y a une cible plus attractive ici. Il semble presque y avoir une ambiance de carnaval. Beaucoup de personnes – on voit un homme les bras chargés de produits – semblent avoir de larges sourires. Ce groupe n’a rien de maussade ou de sérieux.

On dirait qu’on a une réserve de vodka citron New Amsterdam ici. Et un soda à l’orange. Si tu pouvais zoomer là-dessus.

Hey mec, je t’emmerde !

D’accord, on a entendu. Excusez-nous. Ceux qui regardent à la maison, c’est du direct. Que dire de tous les gens qui portent des masques comme ce gars. Combien de personnes sont masquées ? Oh, oh. Bien, comme vous le voyez, nous avons perdu Steve Harrigan. Est-ce qu’il va bien ?

Là des gens me lancent des trucs dessus.

C’est ce genre de scène en ce moment ici –

Stephanie, mettez-vous à l’abri, je vous en prie.

En fait, là je me sens en sécurité. Croyez-le ou pas.

Elle s’amuse. C’est juste une jeune fille qui sourit et là qui nous balance des trucs.

Ok.

Ne le prend pas mal, mais les noirs partent en live. Le bordel de Mike Brown. Nique la loi. Ils ont tué mon négro, sérieux. Ils l’ont tué sans raisons. J’en ai rien à battre qu’il ait volé des cigarillos. Il ne méritait pas de perdre la vie, sérieux. Mais merde, on est là, sérieux ! On est là !

[Fréquence radio de la police du comté de St. Louis]

Réaction suite à l’appel de la mairie et du commissariat de [la ville de] Dellwood pour un cambriolage en cours.

Bienvenu au Black Friday [un jour de congé pour faire du shopping de Noël]. Ils s’attaquent au Toys « R » Us, gars. C’est le bordel. Je vais juste passer devant pour vous.

C’est une révolution complètement à l’américaine en cours juste là chez nous.

Tu sens cette odeur ?

Ouaip, quelque chose brûle.

C’est où ? Ohhhh, le [magasin de télécoms] Metro PCS ! Il crame.

Le Metro PCS est maintenant en feu.

En feu !

Regarde la fumée dans les airs ! Le premier bâtiment à y passer.

Premier bâtiment en feu.

Premier bâtiment à y passer !

Yeah, Yeaaaaaah, yeah !

Hey, prends-moi un soda, fils de pute ! Prends-moi un putain de soda !

L’entrepôt juste en face de Canfield est maintenant en feu.

Des coups de feu partout. Ça devient très effrayant.

Il y a un véhicule à l’arrière du second incendie, dont les occupants lancent des cocktails molotov sur le toit du bâtiment.

Les pompiers luttent contre un autre incendie, au nord de Chambers. Et le feu contre lequel ils luttaient à Walgreens, je suppose que c’est au sud, les pillards sont revenus au Walgreens.

6863 Parker. Il y a un homme avec chapeau rouge, vêtements noirs, transportant une bonbonne de gaz.

Plusieurs voitures ont brûlé devant la mairie de Dellwood, à moins de quatre kilomètres de Ferguson.

Ouais, je suis en train de jeter un coup d’œil de derrière le coin du bâtiment. Et au cours des 15 dernières minutes, on a encore eu environ 30-40 coups de feu. Des armes légères, au loin.

9185, vous demandez à la Garde Nationale de vous rejoindre en première ligne? Je ne vous entends pas.

Ouais, je vais tenir jusqu’à ce que les unités de la Garde Nationale arrivent.

Et à proximité du sud [de la ville de] St. Louis, une foule a bloqué la circulation sur l’autoroute 44.

L’ensemble du groupe qui était sur l’autoroute se dirige maintenant vers le sud sur Grand Avenue.

Ils ne sont pas encore tout à fait au Parc de Tower Grove, mais ils se dirigent tous vers là, plusieurs centaines d’entre eux.

JUSQU’À CE QUE TOUS SOIENT LIBRES

Vous pouvez entendre le système d’alarme se déclencher. Des gens ont sillonné la rue un peu plus tôt en disant, « Pourquoi cassez-vous les fenêtres? ». C’est le magasin de fournitures de bureau FedEx qui a ses vitres brisées.

On vient de voir un gars s’emparer de quelque chose à l’intérieur, Betsy.

Ça ressemblait à une ancre.

Il a attrapé quelque chose et est parti avec.

On dirait bien qu’ils ont pris une arbalète, à ce qu’ils ont dit.

Une arbalète ?

On sait que des poubelles ont été incendiées. On sait qu’il y a eu des pillages dans cette zone. Des vitres brisées du magasin Bread Company et d’une boutique de prêteur sur gage là-bas.

« J’te tiens, négro. Ah, j’te tiens, sale blanc. » Peu importe si c’est noir ou blanc. Comment ça va ? Mains en l’air, ne tirez pas. Par pitié, ne me frappez pas. J’ai déjà pris trois de ces putains de gaz lacrymos.

Voici un direct où ils sont en train de piller dans la partie sud [de la ville] de St. Louis. Ils arrachent le contre-plaqué de devant les portes. Et ils le font juste devant nos caméras. Je veux dire, c’est évident que nos caméras sont juste là.

Il semblerait presque qu’ils ont remarqué nos caméras et se disent « bon, ce n’est peut-être pas une bonne idée ».

C’est le magasin [de télécoms] AT&T.

On est partie sud.

Ils n’ont peut-être pas complètement abandonné l’idée.

Il y a beaucoup de gens. Certains sourient et rigolent. Et, c’est une situation très grave.

[25 novembre

Dernier jour de conflit important]

Les gens font ce qu’ils peuvent pour commencer à nettoyer. On n’a pas l’impression d’être encore dans la même ville, ni même dans le même pays. On dirait quelque chose que l’on verrait dans une zone de guerre. Je suis désolé de dire ça. Mais on dirait que ça a été bombardé, non ?

Le reste des commerces du coin barricadent ce qui n’était pas encore barricadé. Les gens sortent des affaires de leur magasin. Ils s’attendent à ce que ça recommence cette nuit. Donc c’est maintenant en fait, les gens abandonnent le coin.

Nous sommes mardi soir à Ferguson et de retour dans les rues. Hier soir, le tribunal d’accusation a annoncé la non-inculpation de Darren Wilson, comme beaucoup de gens ici s’y attendaient.

Est-ce que justice a été rendue ?

Sûrement pas, putain.

Comment tu connais pas la réponse, putain ? Tout le pays est en ébullition. Le simple fait que tu connaisses pas la réponse, c’est d’la merde ! Va les rejoindre ! Va les rejoindre ! Pourquoi tu nous interviewes, putain ?!

Cette nuit avait débuté plutôt calmement. Les manifestants ont commencé à marcher en partant du commissariat de police de Ferguson. Nous nous trouvons maintenant derrière la mairie.

Défonce cette merde ! Défonce cette merde !

On va le foutre en l’air !

Restez sur le trottoir.

Aaah putain de merde !

Hé mec, vire les caméras, mec ! Vire les putain caméras !

Vous nous tuez ! Nous, on vous tue pas !

Donc on affame les enfants ?!

Nous, on vous tue pas !

On affame les enfants ?!

Vous continuez à nous tuer !

Je te connais depuis longtemps, frère. Longtemps ! Depuis que t’étais grand comme ça !

Et vous continuez à nous tuer !

Vingt-cinq ans que je suis ici !

Et on continue à mourir, putain !

Qu’est-ce qu’ils vont manger maintenant ?!

Et on continue à mourir, putain !

Et puis… après ce déluge d’évènements, tout est retourné à la normale.

Nous sommes retourné·es à la normale.

Mais durant ce bref laps de temps, quelque chose de magique nous était arrivé.

D’une manière ou d’une autre, nous étions parvenu·es à subvertir certains aspects fondamentaux de cette société.

[2. Subversions]

Police, isolement social, commerce, aménagement de la ville

Ces piliers de la société sont si fondamentaux, que nous luttons ne serait-ce que pour imaginer un monde sans eux.

Pourtant, ensemble, des milliers d’entre nous avons renversé nos rapports avec ces choses.

Ne serait-ce que pour quelques mois.

Nous le devons à nos « nous du futur » de célébrer ça.

[Police]

L’obéissance à l’autorité devint sujet de moquerie et céda la place à une attitude pure et simple de défi.

Nous étions devenu·es tellement vivant·es, nous avions oublié comment nous soumettre.

Et la police prit peur, n’étant plus que l’ombre inefficace d’elle-même.

Mais dans l’ensemble, j’ai vu la police effrayée. Et c’était une impression à la fois flippante et positive. J’ai toujours vu la police me jauger, m’agresser jusqu’à ce que je baisse la tête. Mais passer à côté d’eux et voir comment ils tremblaient. Je crois que ça a vraiment marqué les gens.

On n’a pas besoin de vous dans nos rues !

Avec moi : « Nique la police ! Nique la police !

Sans cet insigne, t’es la pire des salopes ! »

(Le seul bon flic est un flic mort)

(Chaos à Ferguson : la décision du tribunal d’accusation déclenche des émeutes ; des dizaines d’arrestations.)

Nique tous les procs’, nique-les !

On n’a pas besoin de vous autres fils de pute dans nos rues !

Avec moi : « Nique la police ! Nique la police ! ».

« Nique la police ! Nique la police ! »

On doit aller où ?

Continuez à approcher ! On vous r’poussera !

Reculez tous de 10 mètres, c’est clair !

N’ait pas l’air si effrayé, espèce de porc ! Ouais, toi, fils de pute !

Toi, le dernier de la rangée !

On est trop nombreux !

Allez vous faire foutre ! Parce que vous autres fils de pute avez menti ! Allez vous faire foutre !

Il ressemble à un pédophile !

Jetez vos armes, allons-y au corps-à-corps !

Maintenant, à un-contre-un sur le côté bâtiment !

Garanti que j’te met k.o. en 5 minutes ! Garanti !

Manifestement, il n’y a pas d’agent de police là-dedans.

En tous cas je ne pense pas.

Et la voiture se remet, ce qui est plutôt normal.

Ces gens sont… ils semblent plutôt fiers d’eux-mêmes à ce stade du jeu.

Où est ton badge nominatif ?

C’est pas un nom, ça. Pour moi, ça veut dire salope.

Quel est votre nom, monsieur ?

Va te faire foutre.

Vous vous appelez « Va Te Faire Foutre » ? D’accord, Va-Te-Faire-Foutre. Bonjour, agent Va-Te-Faire-Foutre.

C’est la dernière fois que vous tuez l’un des nôtres, mec. La prochaine fois, ils vont en perdre un.

Je me sens comme œil-pour-œil et dent-pour-dent. Voilà comment je me sens.

Riposte ! Riposte !

Porc ! Rentre à la maison !

Vas-y, tire ton putain de flingue !

Pop, pop, pop ! Salope !

J’ai pas peur de vous !

J’ai pas peur de vos insignes !

J’ai pas peur de vos matraques !

Ça signifie rien !

Je ne vous crains pas.

Ils sont meilleur que nous parce qu’ils ont un insigne qui brille.

C’est ça, c’est ça, parce qu’ils sont planqués derrière leurs matraques. Et leurs flingues.

Tous les membres de gangs et tout se mettent ensemble. C’est pas courant. Ils attendent pour s’opposer à ce gang-de-merde-là, c’est-à-dire la police.

(Nique la police)

Foutez le camp avec ces conneries ! Va te faire foutre Roorda [le président du syndicat de police] !

Toutes les polices, allez vous faire foutre ! Vous êtes des merdes !

Ça, je pense que c’est une supportrice de l’agent. Ils marchaient ici avec un panneau devant eux qui disait quelque chose en soutien à l’agent. Et alors qu’ils marchaient, une énorme foule s’est rassemblée autour, des bouteilles volaient depuis 10 mètres par-dessus la foule.

Un vrai combat à mains nues. Ça clashe. Bon dieu de merde, ils lancent des briques maintenant.

Ça va pas s’arrêter tant qu’on l’arrête pas nous-même ! Ils nous tuent !

Holà merde !

Et faut pas oublier que j’ai de la famille dans les forces de l’ordre. Genre, de la famille proche. Genre, des gens à qui je ressemble dans les forces de l’ordre. Cela étant dit, je peux toujours pas supporter la police.

Vigile couille molle ! Tu l’aimes ton job ? Tu l’aimes ton job ? Tu l’aimes ce job ? T’es une salope ! Ouais, je l’ai dit. Tu veux me faire quelque chose ? Alors, vas-y.

– Ils entendent les coup de feu. Ils regardent les feux brûler.

– Et ils font que dalle.

– Mais ils restent plantés là… sans bouger putain.

– SWAT team.

– SWAT team.

– Effrayée.

– La SWAT team de St. Louis. Le crème de la crème de St. Louis.

– Tapettes !

Filme ça. Eh, oh, tu t’fous de ma gueule.

[Isolement social]

À une époque de smartphones, d’angoisse généralisée et de consommation médiatique ininterrompue…

Une époque dans laquelle nous percevons nos problèmes comme isolés de ceux des autres…

Nous nous sommes réuni·es en chair et en os.

Bien qu’étrangers et étrangères les un·es aux autres, nous avons transformé le QuikTrip incendié en zone de festival.

Un espace où célébrer notre œuvre subversive.

Nous avons partagé de la nourriture, fait de la musique, dansé, discuté, …

Et pas un seul dollar n’a été échangé dans cet espace où nous étions tous et toutes d’égal·e à égal·e .

(Des images de la police montrent un ado volant dans un magasin avant de se faire tirer dessus par un agent.)

Vous savez, la dynamique était moins celle d’une manifestation de colère contre la police et davantage celle d’une fête de quartier. Vous aviez des gens dans la rue, qui klaxonnaient, qui marchaient dans la rue. Ils agitaient leurs panneaux. Il y a avait de la musique. Ils dansaient. Ils avaient allumé des bougies. Il y avait de l’herbe, de l’alcool.

[batterie et chant :

« On veut la justice. On veut la paix. »

« Mains en l’air. Ne tirez pas. »]

Ils débattent du mot « négro ». Il y a tellement de débats et de disputes ici, que tout peut arriver.

Hey, on est là. Sérieux ! Regarde ça. Il ne s’agit pas d’un truc de noirs ou blancs. Ou meuf, allez, viens avec nous. Il ne s’agit pas d’un truc de femmes ou d’hommes. C’est sérieux comme truc.

C’est horrible. Et le fait que je peux allez là-bas, et que ce flic blanc me dise, « Pourquoi tu irais là-bas ? C’est dangereux. » C’est dingue. C’est dingue. C’est dingue. Rien n’est dangereux. Je me sens vivant aujourd’hui !

Vas-y Harry ! Vas-y Harry ! Vas-y Harry !

Vas-y Harry Potter.

Mains en l’air ! SVP, ne tirez pas !

Mains en l’air ! SVP, ne tirez pas !

Vas-y, chauffe, chauffe !

Inévitablement, l’État s’est senti menacé par notre occupation du QuikTrip.

Nous avons essayé de la défendre de notre mieux, mais l’espace public véritable ne peut pas exister dans leur société.

Tu vois comme ils se la jouent maintenant ? On est tous au milieu de la rue. Ils ont des chiens, des colsons et tout l’bordel. Comme si on leur avait fait quelque chose. On leur a rien fait du tout, merde.

Et une fois que la police a vu beaucoup d’entre nous posés ensemble, ils nous ont dit qu’on devait partir, qu’on devait continuer à marcher, qu’on pouvait pas rester au même endroit.

Ils ont un blindé et des gaz lacrymos. On essaye de rester pacifiques et d’aller à la manif, gars. Regarde ce bordel, l’État policier.

Ils ont ramené tous ces gens ici avec tout cet équipement militaire parce qu’ils ont dit qu’on pouvait pas se réunir.

La police nous dit qu’on doit se disperser, et qu’on doit partir.

« Si vous êtes sur le terrain du QuikTrip, vous êtes rassemblés illégalement. Et vous risquez d’êtres arrêtés. Alors s’il vous plaît, quittez le terrain du QuikTrip. »

[Batterie et chant : « Pas de justice, pas de paix ! »]

[Le commerce]

Dans cette économie impitoyable, nous sommes obligé·es de travailler pour acheter les choses que nous voulons et dont nous avons besoin.

Globalement, des personnes tout comme nous ont produit ces marchandises, les ont transportées et empilées sur des étagères.

Et les voilà – entassées dans des magasins – en attente de nous être vendues par des petits et grands capitalistes de toutes les races.

Et si nous prenons tout simplement ces marchandises, nous sommes appelé·es voleurs et voleuses.

Nous ne posons presque jamais la question : « Qui vole qui ? »

L’espace de quelques nuits enivrantes, nous avons mis cette relation parasitaire sens dessus dessous.

Partout dans la ville, des gens ont dévalisé des magasins, partagé le butin dans la rue, se sont averti·es mutuellement de l’arrivée des flics, et ont invité par texto leurs ami·es à rejoindre la mêlée générale.

Les marchandises n’étaient plus que de simples objets.

C’est comme si nous avions collectivement réalisé que tout ceci était vraiment à nous.

(Un [Little Debbie] et je souris)

Nous avons vu une douzaine de personnes. Une douzaine, en quelque minutes, rentrer et sortir de ce magasin, transportant tout ce qu’ils peuvent utiliser pour contenir des marchandises. Des seaux, des poubelles, des cageots, leur pantalon. Un bac de bière, un autre bac de bière.

Ouais, ils saisissent l’occasion, ces jeunes gens –

C’est presque comme si la nouvelle se répand. Viens en profiter tant que tu peux.

Il semblerait que la nouvelle se répand.

[Musique]

Oh, ils sont rentrés. Ils sont dedans. Hahaha, ouais !

Ils sont dans la boucherie. Steaks gratuits !

Oooh, c’est la folie, frère. J’adore ce bordel. St. Louis en folie, mec. Les fils de pute se font le [magasin de chaussures] Prime Sole.

Y’a plus de téléphones ici ?

– Quelqu’un veut boire quelque chose ?

– Attends, c’est d’la Corona !

Qui a des tickets de loto?

Ne les grattez pas. Ils les comptent.

Le magasin de vêtements DTLR a dû fermer ses portes aujourd’hui, après que les pillards aient causé 10 000 $ de dégâts.

La police affirme qu’ils ont réussi à voler une voiture flambant neuve, en fracassant un portail pour s’enfuir.

Tu n’as pris aucunes jantes ?

Je prend rien, putain ! Mais les miens l’ont fait, et je suis fier des miens pour leur résistance.

Et j’aurais voulu l’avoir fait. J’aurais aimé en faire partie.

Ils veulent principalement juste rentrer à l’intérieur et saisir cette opportunité.

Il peut à peine le porter.

Oui.

Il peut à peine – il a des affaires fourrées dans son pantalon.

Oui.

Des brassées de choses.

Oui.

Le monde regarde.

Oui, Sharon, le monde regarde.

Et vous pouvez voir des gens courir hors du magasin et placer des marchandises dans un véhicule rouge. Et ce sont des femmes !

Vous pouvoir voir maintenant : il y a des rayons, des étagères d’alcool qui ont été pillées. Maintenant dans le reste du magasin, vous avez beaucoup d’autres produits. Vous avez la viande. Ils ont pris la bonne viande.

Et qu’est-ce qu’ils prennent ? Des chaussures, des perruques, des hot dogs ?

Trente, quarante jeunes en train de casser, de briser mes fenêtres et de tirer sur les fenêtres. Et de presque vider mon magasin d’alcools, de cigarettes, de bières. Et d’essayer de mettre le feu au magasin en même temps. Sonny a dit qu’il a trouvé des bouteilles d’alcool dans son magasin qui venaient sans doute de mon magasin, ils les ont emportées là et ont fait une sorte de pique-nique dans ton magasin.

Ça en a tout l’air.

Personne ne devrait avoir à subir ça. C’est l’une des parties les plus déplorables de cette histoire.

Et je suis désolé de ce qui vous est arrivé. Merci à vous deux d’avoir été avec nous.

[L’aménagement urbain]

L’aménagement urbain était là avant même notre naissance.

Dans celui-ci, nos vies sont creuses, désespérées, insignifiantes…

Nous ne nous sentons jamais chez nous.

La ville n’est pas la nôtre.

Elle est conçue pour une population amorphe de producteurs et de consommateurs.

La destruction de ce paysage nous apporte catharsis, camaraderie et tellement de bonheur.

On dirait qu’une tornade a dévasté Ferguson et que quelqu’un est passé ensuite pour mettre le feu au reste.

Putain. Regarde ça. C’est partout.

[Musique]

[Le magasin de beauté] Beauty town a été réduit en cendres.

Ils vont entendre le cri sauvage des fauves qui se lèvent pour Mike Brown.

« Ils ont vu un groupe d’hommes noirs rentrer en voiture sur le terrain de golf Country Club. »

« Des individus marchent en direction du nord sur l’avenue South Dellwood.

Et ils transportent tous des bonbonnes de gaz. »

Je pense que celui-là va brûler. Hahahaha, ils vont cramer celui-là.

C’est plein de colère. Vous savez, les présentoirs sont renversés, il y a du verre partout. C’est pas juste pour prendre les choses. C’est davantage pour faire des dégâts.

A partir de 4h30 le jour de Noël, l’homme a commencé à traîner sur ce parking. Et après avoir choisi sa cible, il a utilisé des pierres pour éclater les vitres.

Il a simplement commencé à vandaliser les voitures et tout, à briser les vitres. Et il n’essayait pas de voler quoi que ce soit, il détruisait seulement les biens.

J’en ai marre d’être pacifique. J’en ai marre d’être calme. Tu sais, ils nous font la guerre depuis plus de 400 ans. Donc, hé, je suis pas pacifique. Je suis pas un manifestant. Je suis violent.

Maintenant qu’il n’y a pas d’inculpation, quelle est la suite ?

Vous le voyez.

Tous ces bâtards vont foutre le bordel.

Donc elle a lancé une pierre et s’est enfuie en gloussant. T’as vu ça ?

Regarde le distributeur de billets, juste là. Dans sa face !

Ils défoncent le distributeur.

C’est parti !

Ce gars a une masse. Une masse, mec.

Hé mec, là-bas le restaurant. Quelqu’un n’est pas arrivé assez rapidement à l’entreprise de bois de construction. Et il y a beaucoup de dégâts ici. Il y a beaucoup de dégâts dans ce coin-ci.

Et c’est ici le quartier commerçant principal, plutôt charmant. Pas si charmant cette nuit, c’est plutôt un cauchemar.

Brûle ce fils de pute !

Masquez-vous, tous ! Masquez-vous !

Prenez-en tous !

Prends ton fric ! Prends ton fric !

Défonce-le ! Retourne-le ! Tu l’as pas retourné encore !

Prends ton fric !

Prends ton friiic !

Oh, désolé mec.

Ça va, ça va, frère. C’est ok, ça va. On est tous ici ensemble, gars.

Mais il y avait des forces – dont certaines à l’intérieur même de la foule – qui ont mal pris ces subversions.

Elles se sont rapidement mises à élaborer des récits intéressés qui menaçaient de dissimuler pour toujours les évènements et la signification de Ferguson.

[3. Complexités]

Voici notre perception de quelques complexités qui ont été manipulées, dévalorisées ou complètement effacées de l’histoire.

[Propagation]

Ferguson n’est que l’une des dizaines de banlieues quelconque de St. Louis.

Dès le premier jour, elle a servi de modèle.

Des gens de toute l’agglomération y ont afflué.

Fait remarquable, cette énergie s’est propagée en retour à d’autres villes proches et lointaines.

Au même moment où la violence et le pillage éclataient à Ferguson, une station-service de [la ville de] St. Louis a été durement frappée par un trio de voleurs. Et nous nous sommes posé la question : ces crimes sont-ils liés ?

Ce n’est pas clair si les évènements de Ferguson sont directement liés à ces vols avec effraction.

La police affirme qu’il n’y a pas de lien, que « C’était un incident isolé. » Mais les riverains du coin, avec lesquels j’ai parlé, disent que « Oui, en effet, il y a un lien. »

Waouw, Je ne m’attendais pas à ce que ça se propage comme ça.

Des crimes opportunistes dans le sud [de la ville de] St. Louis, [dans la ville de] Brentwood et [celle de] University City, pour n’en citer que quelques-uns.

[La ville de] Jennings a été touchée et puis [celle de] Riverview, jusqu’à [celle de] Bellefontaine Neighbors vraisemblablement.

Ces nouvelles images de vidéo-surveillance pourraient aider à retrouver les personnes qui ont cambriolé un concessionnaire de [la ville de] Sunset Hills.

De nouvelles informations concernant un incident ce soir aux Galeries St. Louis [dans la ville de] Richmond Heights. La police a confiné le centre commercial.

Les autorités affirment que les troubles à Ferguson ont provoqué l’extension des pillages à la zone métropolitaine Est [dans l’État voisin de l’Illinois].

Avec la propagation des événements, non seulement la police a été débordée, mais les rapports de pouvoir dans toute la ville ont été remis en question.

Ça concernait dorénavant chaque commerce, chaque force de police.

Le chaos éclate à la mairie de St. Louis. Des bousculades avec, en son centre, le président de l’Association des Officiers de Police.

Nous avons la confirmation qu’un agent de police de [la ville de] University City est blessé par balle.

La voiture d’un chef de la police locale incendiée juste devant le bâtiment de police.

Ces traces de brûlé subsistent sur le parking du commissariat de [la ville de] Beverly Hills dans le nord du comté de St. Louis.

Il s’est avéré que Ferguson n’était pas vraiment un endroit unique de corruption et d’exploitation.

Cela empestait dans toute la région.

Hé, venez tous. Déplaçons ce bordel à [la ville de] Clayton, mec. Si vous allez tous foutre la merde, déplaçons-la à Clayton !

Voyons cette vidéo que nous avons d’un homme qui a jeté des œufs sur le bâtiment administratif du comté ici au cœur de [la ville de] Clayton.

Ouais, t’as raison, [le Casino] Lumiere !

Brûle ce fils de pute !

Tout renverser – ils le font pour de vrai.

On est dans le Casino.

Mains en l’air ! Ne tirez pas !

Pas de Black Friday ! Pas de Black Friday !

Certains prétendaient que la propagation était seulement le fait de personnes extérieures déforçant le combat pour la justice…

En réalité, de plus en plus de personnes se sont reconnues dans les émotions et les activités des autres, et se sont impliquées.

A mesure que les gens voyaient… à la fois leur propre vie, et la géographie de leur routine quotidienne, comme une cible légitime… le mécontentement s’approfondissait.

Mains en l’air ! Ne tirez pas !

C’est le plus beau jour de ma vie.

Pourquoi est-ce que c’est le plus beau jour de ta vie ?

Parce que c’est un mouvement. Et il est temps. C’est notre moment.

Ne tirez pas !

Pas de justice, pas de paix !

Bloquer la 270. Et il est temps, mec, sérieusement. Pas seulement à St. Louis, partout dans le monde, partout. Oui monsieur.

Dans le nord du comté de St. Louis, des centaines de lycéens ont séché les cours aujourd’hui.

Ils organisent des manifestations en soutien à Michael Brown.

A peu près 250-300 étudiants de McCluer et de McCluer North ont manifesté, chaque école de son côté. Ensuite, ceux de McCluer ont marché jusqu’à McCluer North, où tous les étudiants se sont rassemblés. Une plus petite manifestation a également eu lieu au lycée de Hazelwood Central, pas très loin d’ici.

Par contre, il y a eu quelques moments de tension a McCluer North lorsque les étudiants ont commencé à taper sur une voiture de police, la faisant basculer juste un peu.

On doit se serrer les coudes et faire ce qu’il nous semble juste. Si on doit sécher les cours pour ça, alors c’est ce qu’on doit faire.

Si tu connais Florissant, la manifestation est clairement arrivée à Florissant.

Nique la police ! Nique la police !

Nique la police !

C’est clair.

Mains en l’air ! Mains en l’air !

Je vais te choper, garçon ! T’as l’air, genre, « Ramène ton cul ici ! »

Ramène-toi, ne baisse pas les bras !

On fait ça pour Mike Brown !

Vas-y mec.

Mec, regarde, je suis même pas noir, mais merde…

Police – tu vois mec ?

Ils m’ont arrêté une fois, mais j’avais rien pris.

J’en ai marre, mais j’m’en fous.

Justice pour Mike Brown !

[La banlieue]

La banlieue.

Pensée pour favoriser l’isolement social et la sécurité.

Un paysage de voitures, de centres commerciaux, de lotissements, d’immeubles…

Un lieu où la géographie rend la rébellion impossible.

Mais l’esprit humain ne peut être supprimé simplement par un environnement manufacturé spécifique.

Très vite, les caractéristiques typiques de la banlieue ont été complètement renversées.

Je vous vois. Je vous vois.

Je sais où on en est. Vous m’entendez ?

C’est ma propriété !

C’est mon jardin !

On vit ici. C’est notre maison.

C’est à moi, bordel.

C’est notre demeure.

Rentrez chez vous, putain !

La police, inquiète pour sa propre sécurité, a capitulé face aux lotissements et immeubles sombres et peu familiers.

– Ces immeubles comptent un milliers d’appartements, des logements sociaux, tu piges ?

– Tu crois que les gens sont en train de se terrer et d’attendre ?

– Tu crois qu’ils vont rester à la maison toute la nuit ?

La police ne pourra pas passer par là, point barre.

Ces trouillards de flics vont rester sur cette route principale.

Ils sont passés en fourgon blindé et ont balancé des grenades lacrymogènes. Ne pensez pas que c’est réglé. Les gens sont juste derrière ce coin, juste en bas de cette rue, et en bas de cette rue.

Et c’est là où la situation devient d’autant plus traître, parce que vous progressez maintenant dans des rues plus sombres. Et j’ai vu un groupe d’environ 15 personnes se disperser dans tout le quartier.

Les craintes de la police se sont confirmées lorsque des coups de feu ont retenti depuis les ruelles boisées.

Il y avait foule ici cette nuit-là. Et des coups de feu ont été tirés de quelque part par ici, du côté des lotissements ou de cet immeuble.

Plusieurs coups de feu sont tirés au loin. Et lorsque les policiers entendent les tirs, le commandant leur dit : ne quittez pas le rang, parce qu’alors vous serez dans un quartier où il fait complètement noir.

Ils devraient s’inquiéter pour ces fils de pute de la zone.

Sérieux. Ils vont pas venir ici pour rigoler.

La vie de banlieue est conçue autour de la voiture.

Mais durant ce bref moment, la voiture a été réinventée.

Les véhicules prévus pour faire la navette boulot-dodo sont devenu des objets de jeu…

Injectant de la vie dans les rues et sur les parkings.

Mains en l’air ! Mains en l’air !

Au lieu de servir à se rendre au centre commercial pour un dimanche de shopping,

la voiture est devenue un outil pour les tournées nocturnes de pillage.

Ça ressemble à un drive-in pour pillage. Donc les voitures s’arrêtent à la porte, des gens rentrent, attrapent ce qu’ils veulent, et sortent en courant, sautent dans la voiture et s’arrachent.

J’ai remarqué que de nombreuses plaques ont été retirées de ces voitures. J’ai vu des femmes, de jeunes enfants, des adultes. Une camionnette est passé devant moi avec probablement sept ou huit jeunes hommes, un foulard sur leur visage. Donc voilà le problème auquel nous avons affaire ici : ces bandes itinérantes de pillards.

« Il semblerait qu’ils viennent de voler deux ou trois voitures et les ont conduites directement à travers la porte [du concessionnaire] AutoTire. »

[La fétichisation du pouvoir policier]

Le récit dominant de Ferguson est obsédé par le pouvoir policier…

et toute son imagerie spectaculaire.

Les gaz, les blindés, les boucliers et les flingues.

Dans cette histoire, il n’y a pas de foules dynamiques, seulement des victimes passives.

Mais c’est tout l’inverse.

C’est dans nos vies normales que nous sommes victimisé·es par la police…

Seul·es et impuissant·es.

Nous avons découvert qu’en nous regroupant dans les rues,

l’autorité de la police n’avait plus d’importance.

Coups de feu, pillages, foules joyeuses et indisciplinées…

Pour une fois, nous étions les protagonistes.

Pour une fois, la police était sur la défensive.

C’est seulement à ce moment-là – dans une tentative désespérée de restaurer l’ordre – que la police s’est militarisée.

Et plus tard, elle a fait venir la Highway Patrol – [la Police des Autoroutes] – et la Garde Nationale.

Monsieur, vous savez pourquoi ils apportent tout cet équipement ?

Vous devez tous reculer un peu, ok ?

Vous savez pourquoi ils font venir des véhicules blindés ?

Malheureusement, cette obsession du pouvoir policier a lentement pris le dessus.

Avec le temps, les foules – qui avaient cessé d’être des victimes de la police…

Se sont transformées en foules ne faisant que se plaindre d’être des victimes de la police.

[Les représentants]

Durant ces mois d’effervescence, certaines personnes – prétendant être du côté « du peuple » – ont pris l’initiative de s’emparer du micro.

Chose curieuse, les sons qui sortaient de leurs grandes gueules ressemblaient étrangement à ceux de l’État et des médias.

On ne vole pas nos villes ! On ne fait pas ça ! On a besoin d’utiliser cette station-service ! On a besoin de ce [supermarché] Walmart !

Le NAACP [l’Association Nationale pour la Promotion des Gens de Couleur] recommande vivement le calme cette nuit, que chacun prie pour la paix. Elle demande que les jeunes gens impliqués dans ces actions de protestation et ces manifestations se calment, retournent à leur maison.

[Francis Slay – Maire de St. Louis]

Ce que fait cette violence, ce n’est pas seulement donner une mauvaise image de notre communauté, mais ça fait vraiment reculer la cause de la justice sociale.

Voilà l’image que les noirs de St. Louis veulent donner d’eux-mêmes ? Une bande de sauvages qui ne sait pas se conduire de manière à obtenir des résultats ?

Il y a une façon constructive d’aller de l’avant pour la famille de ce jeune homme. Et ce n’est pas celle-là.

[Nelly – Rappeur célèbre de St. Louis]

Faire preuve de dysfonctionnement, de malveillance, de dévastation, c’est contre-productif.

Ça n’aide pas à approfondir ce que les gens veulent formuler, ou à exprimer la colère légitime face à la mort de Mike Brown. Ça nuit à la communauté et ça fait disparaître des commerces qui servent la communauté.

Ne soyez pas tellement en colère !

Soyez calme. Soyez patients. Et soyez pieux.

En tant que pasteur, je dois être soucieux tant de mes frères et sœurs qui manifestent, que de mes frères et sœurs qui travaillent dans la police. Donc nous avons beaucoup de travail à faire en terme de processus de guérison.

Le pasteur Charles Ewing a déclaré à son assemblée de fidèles que les émeutes et le pillage ne sont pas le chemin, mais Jésus est le chemin.

Le politicien Al Sharpton, du Parti Démocrate, a animé une réunion appelant à l’unité entre les riverains et la police.

[Chante : ] Sing it like you mean it…

On doit encore se mettre à genoux. Et on doit prier. On doit remercier Mike pour sa vie, pour le changement qu’il va apporter, et ça nous rend meilleurs. Je vous aime. Je garde la tête haute avec vous. Et je vous verrais là-dehors ! Merci.

Alors que la plupart sont venu·es pour participer, pour agir et parler avec leurs tripes…

Ces représentant·es auto-désigné·es – depuis les activistes jusqu’à la police et aux médias – sont venu·es pour ériger des murs entre les gens.

Iels ont défini qui était un·e manifestant·e légitime, qui un·e opportuniste…

qui était la communauté, qui l’étranger·e…

En bref, iels ont cherché à définir à qui ce moment appartenait.

Les pillards ne sont pas des gens qui se soucient de cette communauté. Ce sont des gens extérieurs à cette communauté qui se fichent de ce qu’il se passe.

[Sam Dotson

Chef de la police de St. Louis]

Il y a des gens ici qui sont réellement venus pour faire entendre leurs émotions. Et donc c’est ce que nous faisons – nous protégeons leurs droits. Mais il y a certainement ici un bon nombre de gens, et plus qu’on ne peut en compter sur les doigts d’une main, qui sont des agitateurs.

[Antonio French

Conseiller municipal de St. Louis]

Il y a des gars qui sont des opportunistes. Et ils voient ça comme une occasion pour causer des problèmes. Ceux qui ont causé ces problèmes la nuit dernière, n’étaient pas des manifestants. Ils n’étaient pas ici toute la journée avec nous.

Les gens qui étaient impliqués là-dedans la nuit dernière ne cherchaient pas la justice pour ce jeune homme, de toute évidence. Ils cherchaient à créer des problèmes.

Un manifestant est pacifique et respectueux. Un manifestant ne s’affronte pas à la police. Il ne lance pas de cocktails molotov.

Je suis rejoint par [le rappeur] Tef Poe, qui utilise son influence au sein de la communauté, pour mobiliser pour la paix.

Le jour où les émeutes ont éclaté, moi et mes camarades avons organisés un sit-in pacifique.

Laissez les agitateurs et les criminels rester ici tout seuls. Et on verra une différence. Et nous allons les identifier, et les éliminer.

On a appris aux gens à faire valoir leur droit à se rassembler, de la bonne façon. On n’était pas en train d’éclater des trucs et de faire les idiots.

Nous avons des gens, principalement comme ces messieurs, qui commettent des vols par effraction et nuisent à la réputation des véritables manifestants pacifiques.

Inévitablement, la logique de ces représentants s’est propagée vers le bas.

À mesure que des travailleurs ont commencé à s’identifier à la communauté des commerçants plutôt qu’aux émeutiers.

On veut le rouvrir. On veut être ici pour la communauté. On veut juste pas des opportunistes venant d’autres communautés. Les gens qui sont venus dans ce magasin ne faisaient pas partie de la manifestation. C’étaient des opportunistes.

A. J. Wells travaille ici et dit que la période des impôts est leur plus grosse rentrée d’argent.

Oh, j’espère que les flics le trouveront avant moi. Ce genre de truc, c’est mon gagne-pain qui est attaqué, tu vois.

On a soutenu la manifestation toute la semaine. En fournissant de l’eau, des sodas, de la glace, pour que les manifestants restent hydratés. Mais c’est comme s’il y avait cette petite foule, qui vient de je sais pas où, qui veut juste foutre le bordel.

Et des client·es fidèles – s’alliant avec la communauté des commerçant·es – ont commencé à humilier les émeutier·es publiquement.

Regardez. Une note d’un voisin disant, « [QuickTrip], revient s’il-te-plaît. J’ai été un client fidèle. On est désolé de ce qui est arrivé. » Une sorte d’excuse de la part de toute cette communauté.

Vous voyez, ce gars est ici pour servir la communauté, et le pays, et faire tout ce qu’il peut. Il tente de gagner sa vie. Les gens ne devraient pas se ramener chez lui et le voler.

Ils détruisent des emplois. Vous savez, il y avait seulement des noirs qui travaillaient dans ces magasins. Et maintenant, ils n’ont pas de travail.

Je travaille, moi. C’est ce que font les noirs. On est ici pour une cause, pas pour voler les gens, merde.

Je suis gênée en tant que femme noire. Je le suis vraiment. Les miens sont juste en train de foutre la ville en l’air.

S’ils avaient quoi que ce soit à voir avec Mike Brown, alors ils seraient avec la famille. Ils feraient des choses convenables. Ils prieraient pour eux. Je n’ai pas élevé mes fils de cette façon.

Les gens qui ont pillé, ils ne font pas partie de ce qui est mis en place pour aider la famille Brown, et pour aider cette communauté.

Oh mon dieu. La mort de Mike Brown ne justifie ces actes d’aucune façon. Je ne sais pas quoi dire d’autre. C’est juste triste.

C’est un sujet sensible pour vous.

Ouais.

Et lorsque humilier d’autres personnes en critiquant leurs actions ne suffisait pas…

Certain·es sont intervenu·es physiquement.

Ces gens ordinaires ont choisi de défendre la propriété privée, adoptant le rôle de la police.

Il y avait des gens à l’intérieur qui essayaient de piller ou quoi. Et un groupe de gars est arrivé dans la rue, et nous sommes venus arrêter ça. Parce que ce n’est pas le message que beaucoup d’entre nous veulent adresser au monde.

Plusieurs personnes sont arrivées et se tenaient là, parlant aux manifestants, leur disant, « Hé, partons. » Et ils se tenaient juste là devant ces commerces. Et je peux vous dire, s’ils sont prêts à rester et défendre ces commerces, nous allons rester là également et défendre ces commerces.

On ne pille pas ici ! Pas ici. On ne pille pas ici.

Parce que Michael Brown ne veut pas ça.

Tu n’en sais rien.

J’ai pas besoin de le savoir. Mais je sais qu’il ne veut pas que tout le monde pille et cambriole des magasins, dans le même endroit où je dois vivre, et que mon fils doit vivre.

Tu vas nous tirer une balle, frère ?

Je ne tire sur personne, mais vous pillez tous sans raison.

Nique ce blabla pacifiste ! Il doit nous laisser bouffer de ce truc, putain !

C’est barbare. Je comprends pourquoi le commissaire vous appelle une bande de négros ignorants.

Hé, c’est pas de ça qu’il s’agit mec ! Voler les trucs des autres, merde ! Le monde entier nous regarde ! Et vous autre négros faites que voler, putain mec !

– Le pillage, c’est pour toi et Mike, hein ?

– Ça peut pas être pour les deux, frère.

– Mais tu te couvres la tête. Et tu te déguises.

– Y’a pas de justice comme ça.

On défend notre bordel ! C’est à nous ! On défend ! On défend !

Pourquoi on fait QUOI?! Pourquoi on fait QUOI?!

– On vit ici !

– On dors, on mange et on vit ici, putain !

– Je reste ici. Qu’est-ce que tu veux dire, putain mec ?

Il faut que tu bouges ! C’est pas si important! C’est pas ton biz. Oh mon dieu. Elle va mettre sa vie en danger ? Pour un [snack] Papa John’s ?

Mais il y a avait une certaine faction, qui prétendait être contre les réformes, contre le système.

Ces « révolutionnaires » – avec leurs uniformes, formations militaire et discours sur les armes – reproduisent l’image de l’État.

Ils se perçoivent comme un « État en attente ».

Exigeant discipline, rôles spécialisés et obéissance à une idéologie.

Et à l’instar de l’État, ils étaient menacés par les factions les plus imaginatives de la foule.

Lorsque la police et ces nationalistes noirs ont réalisé qu’ils avaient chacun perdu leur légitimité et ne pouvaient contrôler la foule…

Ils se sont unis pour l’écraser.

Un parfait exemple… la première nuit du couvre-feu en août.

Mon nom est Malik Shabazz.

Mes militants, ainsi que le New Black Panther Party et la Nation of Islam,

nous avons de bonnes relations avec les manifestants.

Ils me respectent. Ils nous respectent.

Donc nous pouvons leur parler, et les faire partir.

Ma question précise est :

Le fardeau de mettre fin à la manifestation cette nuit, pourrait-il reposer sur nos épaules ?

Il y avait des messieurs en pantalons noirs et chemises noires. Et j’ai dit qu’ils sont venus ici, et qu’ils ont fait leur job. Et je l’ai dit au gouverneur, et je le dirai à la nation. Ces groupes ont aidé, et ils font partie du processus. Et j’en suis reconnaissant.

Il y a quelques minutes, j’ai vu Antonio French ici, ainsi que Lewis Reed de la ville de St. Louis. Ils ont tous les deux affirmé qu’ils seraient là avec d’autres militants de la communauté pour dire aux gens de rentrer à la maison.

Ce couvre-feu, cette nuit à minuit. Quelle est votre opinion là-dessus ?

Je le soutien. Je pense qu’il y a urgence, que nous sommes dans une situation de crise.

Si vous êtes ici à Ferguson, après minuit, nous ne pouvons pas assurer votre sécurité.

[Jamilah Nasheed

Sénatrice de l’État du Missouri]

Vous devez partir d’ici ! Parce qu’il y aura des arrestations vers minuit !

Si vous travaillez avec moi cette nuit, notre message passera et pas un autre message ! Donc, ne laissez personne vous provoquer cette nuit !

Nous devons gagner cette nuit, pas eux.

Allez, on y va. Rentre à la maison gars ! Y’a rien d’autre ici.

C’est le gars qui se trouvait sur le côté droit de la tribune à la conférence du gouverneur.

Lui avec le mégaphone, qui essaye de dire à tout le monde…

C’est ce que je disais, les vieilles têtes étaient ici l’autre nuit. Mais ils n’étaient pas là durant toute la nuit. Genre, ça fatigue.

« Evacuez la zone immédiatement. Vous êtes en violation du couvre-feu imposé par l’État. »

Des discussions animées et des conflits parmi la foule ont été signalés.

Mmh Mmh. Il y avait une série de désaccords. Surtout des gens qui essayaient de pousser le gros de la foule à rentrer à la maison et à respecter le couvre-feu. Et d’autres personnes qui disaient seulement « Si tu as peur, rentre à la maison toi-même. Mais moi je suis là. Je reste. »

Pourquoi y avait-il autant de grandes gueules qui voulaient nous faire rentrer à la maison, nous faire tenir tranquille ?

Pour faire simple, iels se sentaient menacé·es par la foule.

La nuit du couvre-feu en était tout simplement l’exemple le plus manifeste.

Mais à chaque étape, celleux qui ont du pouvoir, et celleux qui aspirent à en avoir, ont tout fait pour réduire la portée de nos actions…

Nous menant en troupeau hors des rues palpitantes, à leurs meetings et conférences de presses, dans leurs églises et centres communautaires – essayant désespérément de préserver cette société et leur statut au sein de celle-ci.

Mais j’ai également vu présents le clergé, et les aînés de cette communauté. Et les activistes. J’ai vu les jeunes venir et discuter entre eux.

Et parfois, le meilleur mode de contrôle, c’est de nous contrôler nous-même.

Recule !

Repousse-les, mec !

Et de nombreuses personnes – utilisant l’intelligence de leurs propres yeux et expériences – ont vu clair dans le jeu de ces charlatans, ces réformistes.

Et donc, Claire, il y avait certainement beaucoup d’émotion dans cette pièce. En fait, à certains moments, la colère a vraiment débordé. Beaucoup de gens parlaient en même temps. Ils criaient, ou plutôt hurlaient, sur le gouverneur, sur le capitaine Johnson, sur le congressiste Lacy Clay, sur quiconque montait à la tribune. En fait, par moments, le pasteur montait sur le podium, pour demander aux gens de ne pas oublier qu’ils étaient dans un lieu de culte, de rester calmes, de rester disciplinés.

« Il y un véhicule en feu. Une camionnette de l’église. »

– Ils viennent ici nous provoquer, mec !

– Et nous on a dit qu’on allait emmerder personne.

Antonio French a dit que son bureau, le HEAL St. Louis, a aussi brûlé cette nuit.

Ce bureau était mis sur pied pour essayer d’amener les gens à voter et à faire bouger les choses à Ferguson.

Comment allez-vous ? Vous êtes ici pour nous soutenir ? Vraiment ?

Hé, vous allez marcher avec nous aujourd’hui ou juste rester assis dans la voiture ?

Quand est-ce que tu vas arrêter de nous trahir Jesse ? Nan, y’a pas de « Attends un peu, frère. »

C’est sérieux ! T’es pas un leader. On veut pas de toi ici, frère. D’ailleurs, t’es même pas un frère. Passe ton chemin et sors les frères de prison.

Al Sharpton et Jesse Jackson sont ici en train de perpétrer un mensonge et une imposture. Ils sont payés pour mener cette marche. Ils peuvent la fermer. Ils peuvent s’asseoir. Se taire. On ne veut pas entendre ce qu’ils ont à dire.

Révérend Sharpton, le slogan « Les balances se prennent des points de suture » a été peint à la bombe sur le QuikTrip. En tant que balance fédérale, monsieur, est-ce que vous craignez pour votre vie ? Êtes-vous ici pour balancer les émeutiers ?

Al Sharpton, genre il parle pour tous les noirs. Il ne parle pas en notre nom ! Vous comprenez tout de travers.

Al Sharpton.

Il ne viendrait pas ici avec nous.

Pourquoi pas ? Parce que c’est une marionnette.

Il est rien du tout.

Ils ont essayé de le faire venir ici pour nous contrôler.

Il ne ferait même pas ça. Qu’il aille se faire foutre.

[Les armes à feu]

Nuit après nuit, une foule intrépide et autonome est descendue dans les rues.

Iels ont pillé, incendié et jeté des bouteilles.

Et pour la première fois en une génération – ici aux U.S.A – beaucoup ont choisi de jouer avec le pouvoir meurtrier des armes à feu.

Coups de feu. Coups de feu.

Ça c’est des coups de feu.

Tu vois c’qui s’passe.

Vas-y vise-les encore.

Allez-y seulement, courrez.

Je parie que vous allez pas courir là-bas maintenant.

J’ai entendu quelques détonations. Et quelqu’un a dit, derrière moi il a dit, « Si t’as un flingue, pourquoi gaspiller des balles en tirant en l’air ? »

Un groupe de 15-20 personnes, rassemblées devant un magasin d’alcools. Elles ont tenté de rentrer à coups de pieds et de pierres. Quand ça n’a pas marché, l’un d’entre eux a dégainé une arme et tiré sur la vitre.

Il y avait des fauteurs de trouble, armés, sur le toit du [restaurant] Red’s Barbecue.

J’ai vu quelques personnes avec des armes de poing. Ils se tenaient devant des véhicules qui selon eux contenaient plus d’armes. Et ils se disaient prêts à les utiliser.

Des agents rapportent également des tirs nourris d’armes automatiques dans le coin de West Florissant et de Canfield.

ATF [le Bureau des Alcools, du Tabac et des Armes à feu] déclare qu’ils ont entendu plus de 150 coups de feu pendant la nuit.

Autant les balles réelles que la menace implicite posée par les personnes armées ont contraint la police à se replier, nous concédant de grandes étendues d’espace.

« A toutes les unités dans le secteur, coups de feu avec armes de gros calibres, plusieurs tirs. Les voitures, évacuez la zone. »

Une voiture de police s’est fait tirer dessus et a battu en retraite.

Cet homme de 28 ans est Terell Doss. Il est accusé d’avoir tiré sur un hélicoptère de la police du comté de St. Louis.

Une voiture de police a reçu des tirs et un autre homme a été vu agitant une arme sur le carrefour.

« Je répète, ici la police. Évacuez la zone immédiatement. »

Ils roulent droit dans la foule.

C’est un vrai flingue. C’est un vrai flingue.

J’étais assis là et j’entendais à la radio les cris des agents qui essuyaient des tirs.

« Coups de feu a Chambers et West Dell. On va se tirer d’ici. »

Les pompiers aussi ont dû évacuer au milieu des coups de feu…

Donnant largement le temps aux flammes de se propager.

Les pompiers ont dû quitter les lieux, parce qu’il y avait des gens qui leur tiraient dessus. Ils ont même laissé les lances d’incendie. Ils sont partis aussi vite que ça.

Vous avez eu affaire à des tirs là-bas plus tôt dans la soirée.

C’est exact. Pas seulement un peu de tirs, beaucoup de tirs.

Ils ont l’équipement pour réagir à tous ces incendies, mais ils ne sont tout simplement pas en sécurité.

Pratiquement, ils sont donc contraints de laisser ces incendies et ces bâtiments juste, brûler.

Mais, sur les – environ – 7 personnes touchées par balles lors des manifestations en 2014…

Pas une seule n’était flic.

Les tirs amis sont la conséquence inévitable de l’utilisation des armes à feu dans un contexte de foule.

Que t’est-il arrivé ?

Que s’est-il passé ?

Tout ça, c’est des blessures par balle.

On nous signale une victime de coups de feu au McDonald de West Florissant.

J’ai vu une voiture s’arrêter et un monsieur en sortir, qui s’était fait tirer dans la main, et qui marchait étourdi dans la rue.

Voilà le blessé, juste là. L’homme blessé est amené jusqu’au cordon de police. Maintenant le cordon de police s’avance. Ils ont leurs armes levées. Ils ont pris ça pour une menace.

Merde.

Ils tirent !

Merde.

Merde. Quelqu’un a été touché. Il est touché.

Ce fils de pute a été touché.

Où est la lampe ?

Juste ici, juste ici.

Elle veut pas s’allumer.

Putain.

Il va bien ?

Ouais, il va s’en tirer.

Je vais chercher ma voiture. Je vais chercher ma putain de voiture.

Un homme a été touché deux fois au ventre. Ils viennent de le mettre dans une voiture et sont partis. Je sais pas s’il va s’en sortir.

Dans cette atmosphère de peur, la seule personne dans la foule à être en sécurité est celle qui presse la détente.

J’ai besoin d’un masque.

On a des tirs à balles réelles. Une grosse série de tirs à balles réelles.

Cette utilisation des armes à feu avait d’autres conséquences imprévues.

Soudainement, les quelques personnes armées contrôlaient l’ambiance de la nuit.

Le pouvoir singulier du flingue remplaçait le pouvoir collectif de la foule.

Dans les faits, celleux qui tiraient des coups de feu, lançaient au reste d’entre nous un ultimatum :

Prendre le risque de se faire tirer dessus, ou rentrer à la maison.

Il y a des tirs.

Oh, c’était à coup sûr des tirs.

Coups de feu. Temps de partir.

Il est définitivement temps de se tirer d’ici. Et on n’aurait pas dû venir, parce que c’est une mauvaise idée.

Ouaip, c’est tout pour moi ! Retour à la maison.

Au moins quatre ou cinq tirs. On s’est tous mis à l’abri. Puis j’ai traversé la rue, et ils étaient en train de mettre une victime des coups de feu dans une voiture. C’est à peu près tout ce que je sais, parce que tout le monde a commencé à partir une fois que c’est arrivé. Et j’ai décidé que c’était une bonne idée de me barrer d’ici aussi.

[Une troisième voie]

De plus en plus, il semblait que pour participer, nous nous retrouvions avec deux choix :

Rejoindre les réformistes…

à l’aise avec les médias, suffisants, faussement conflictuels…

dirigeant des manifestations où tout est écrit à l’avance.

Ou rejoindre les cow-boys…

Imprudents, sinistres, machos…

espérant une fusillade avec la police dans les rues.

Mais de quelle sorte de choix s’agit-il ?

Il doit y avoir autre chose.

Une troisième voie.

Qui inclu les gens remontés non seulement par le meurtre de Mike Brown,

mais aussi par leur impuissance et leurs frustrations quotidiennes.

Où un méli-mélo d’individu·es peuvent agir côte à côte…

Un environnement accueillant, avec de l’espace pour questionner des facettes de la société au-delà des questions de police ou de race. Où les gens sont autorisé·es à être à la fois dans la confrontation et dans le jeu.

Oh, ce négro vient de lancer quelque chose. Oh, merde. Hahaha !

Cela semble être un beau rêve.

Mais cet esprit et cet espace étaient bien vivants lors des premiers jours.

Rappelle-toi le potlatch festif sur les ruines du QuikTrip,

l’emploi subversif des voitures dans les rues de West Florissant.

la joie des pillages de masse,

les danses devant les feux…

Des étranger·es de toutes races luttant côte-à-côte.

Les pierres, molotovs et barricades ont tenu la police à distance aussi bien que les flingues.

Une poignée d’entre nous a construit des barricades, pour qu’ils ne puissent pas passer. Voilà pourquoi ils sont arrêtés actuellement. Ils ne peuvent même pas franchir les briques qu’on a posées.

Comme vous pouvez voir ici, il y a plein de briques qu’ils ont mises au milieu de la rue. Des civils ont pris des briques de cet entrepôt de stockage juste là et les ont mises dans la rue pour essayer d’empêcher les véhicules blindés de passer.

Nous avons vu des barricades enflammées être dressées le long de Canfield – la rue dans laquelle Michael Brown a été tué.

On a reçu de multiples signalements supplémentaires de lancers de cocktails molotov. Des barricades de fortune ont été installées pour bloquer la police. Des bouteilles et des fusées ont été lancés contre la police.

Les réformistes ainsi que les rois de la gâchette – négligeables lors des premiers jours – ont progressivement étouffé cette troisième voie.

Intentionnellement ou non, autant leurs mégaphones que leurs flingues ont chassé les gens hors des rues et les ont ramené·es à leur vie normale.

Et si nous étions parvenu·es à identifier et repousser ces deux camps envahissants, et à saisir plus de temps pour expérimenter ?

La vérité, c’est que nous avons échoué.

Et en définitive, tout ce qui restait, c’était des spécialistes, des sympathisant·es et des spectateur·ice·s.

Le moment qui nous avait emporté avait pris fin. Et puis…

à notre grande stupéfaction, les évènements auxquels nous avions participé ont été complètement réécrits.

Notre histoire extraordinaire, dans laquelle un grand nombre de personnes avaient ébranlé la société,

avait été déformée en une histoire rebattue de gens se rassemblant pour obtenir justice.

Domestiquée en profondeur, Ferguson a été facilement intégrée à ce cauchemar capitaliste.

Nos tentatives pour échapper à ce monde misérable ont été sabotées par celleux cherchant à réformer le pouvoir.

[Belle Nuit pour une Révolution]

La prochaine fois que nous nous retrouverons dans une situation aussi prometteuse…

Nous ferions bien de nous souvenir de ceci :

L’effort pour réformer le pouvoir va toujours gâcher le rêve de détruire le pouvoir.

Bon Voyage.

Nous prions. Seigneur Dieu ! Nous sommes las.

Merci à toutes et tous qui ont participé et essayé de pousser les choses plus loin…

Mais nous venons à toi aujourd’hui, pour que tu puisses continuer à nous combler de ton esprit.

Nous sommes venus pour que notre communauté puisse être entière.

Merci à toutes et tous qui ont pris soin des blessé·es et des prisonnier·es…

Nous prions pour que ta force soit avec nos habitants, les familles et notre communauté avec nos agents de police, ceux qui se sont réunis dans ta paix, pour apporter la paix.

Et nous prions pour que tu continues…

Merci à toutes et tous qui ont aidé avec

des retours,

des traductions,

des logiciels gratuits et open-source…

et des années de discussions attentionnées.

…à nous bénir à mesure que nous avançons. Puisse ta paix régner sur nous, pour que nous puissions à nouveau nous réjouir de cette communauté et ce temps passé ensemble.

Que nous ne laissions pas…

Envoyez tous les mails de haine et mises en demeure à touchthesky@riseup.net

…les choses qui continuent de nous diviser, nous séparer. Nous prions au nom de Jésus. Amen.

[Chanson : Satan ! Satan!]